Depuis une dizaine d’années, il ne faut plus espérer que les films de Gus Van Sant se démarquent du tout-venant de la production indépendante américaine : le réalisateur a compris que si le minimalisme et l’expérimentation étaient acclamés par les critiques, ils étaient moins appréciés des spectateurs et qu’en faisant la part des choses, c’est quand même un peu pour eux qu’il tourne des films. Depuis que le succès de ‘Harvey Milk’ lui a confirmé que cette nouvelle orientation de carrière était viable, Van Sant a réalisé des choses assez diverses, dont quelques films mélodramatiques jusqu’au ridicule, à l’instar de ‘Restless’�, et ‘Nos souvenirs’ fait malheureusement partie de cette dernière catégorie. Pourtant, Van Sant avait cette fois choisi de planter sa caméra à Aokigahara, la fameuse “forêts des suicidés� au pied du mont Fuji, un endroit magnifique, doté d’une atmosphère très particulière, qui constitue peut-être la meilleure chose qu’il y ait à mentionner à propos du film...parce que pour le reste, le scénario est si convenu et si prévisible, qu’on sait exactement comment les choses vont tourner :
un type veut en finir, va dans les bois, rencontre un autre type venu pour les mêmes raisons que lui et au fil des efforts qu’ils devront fournir pour survivre et des discussions qu’ils auront entre compagnons d’infortune, le premier finira par revenir sur sa décision, alors qu’une trame secondaire révèle parallèlement les raisons qui l’ont poussé à cette extrémité.
Vous me direz que Van Sant aurait pu se débrouiller pour magnifier ce schéma passe-partout mais il aurait fallu, pour commencer, que McConaughey joue un peu moins mal (et c’est plutôt bizarre venant de lui). Même l’atmosphère fantastique et surnaturelle, indissociable du lieu, qui transparaît en filigrane ne parvient pas à sauver le résultat de la platitude. Il y un autre problème, un tout petit détail mais le genre de tout petit détail capable de vous plomber tout un film. Quand on veut la jouer déchirant et lacrymal, il y a toujours le risque d’aller un cran trop loin. Ce risque, ‘Nos souvenirs’ l’a pris...et il a perdu…et quand un mélo dérape, c’est à peu près foutu ! (Spoiler) :
si on ne lui avait pas décelé une tumeur dans son cerveau à elle, le couple formé par, McConaughey et Watts aurait implosé. Mais là, l’adversité les a réunis, leur a permis de ne plus taire leur souffrance intime, leur a permis de roucouler comme autrefois. Mais la maladie est là, menaçante, potentiellement mortelle : il faut tenter l’opération de la dernière chance. Va-t-elle réussir…? Ouuiiiii, madame s’en sort, l’amour a triomphé, monsieur lui fait des mamours, jure qu’il va cesser de s’accrocher à son sale travail chronophage On l’emmène la miraculée en ambulance se reposer dans un centre de revalidation...et là, au premier carrefour, Bardaf ! l’ambulance se fait défoncer par un Trente-huit tonnes surgi de nulle part.
Je n’en suis pas fier mais cette scène est d’une logique tellement cartoonesque que je n’ai pas pu m’arrêter de rire pendant au moins cinq minutes…!