Le film de Barbet Schroeder fait partie de la sélection officielle de l'édition 2015 du Festival de Cannes, présenté en séance spéciale.
A l'origine, Barbet Schroeder avait en tête trois idées de départ pour l'intrigue de son film qu'il résume de la manière suivante : "J'avais trois ambitions dès le départ, toutes à la limite de l'impossible ou en tout cas de ce qui est habituellement montré ou accepté au cinéma : Tenter de faire du refus d'une langue le principal ressort dramatique du film; Tenter de faire le récit d'une histoire d'amour se développant hors sexualité mais grâce à une succession de non-dits, entre deux personnages dont le lien est purement spirituel et platonique ; Tenter de donner le sentiment que c'est la vie elle-même qui coule jusqu'à ce que l'on découvre que c'est en fait un drame (le drame d'un pays) qui est en train de remonter à la surface."
Le film a été tourné à Ibiza, une île que le réalisateur connaît bien puisqu'il y a tourné son premier film, More, en 1968. Ibiza a surtout une valeur sentimentale pour Barbet Schroeder puisque sa mère y a acheté une maison en 1951 au départ comme une résidence secondaire avant d'y séjourner à plein temps.
Certains thèmes du film et notamment le refus de la langue allemande par le personnage de Martha font assez clairement référence au passé de Barbet Schroeder comme ce dernier l'explique : "Je ne parle pas allemand qui est pourtant ma langue maternelle. Je suis suisse et mon grand-père maternel est le philosophe et psychiatre allemand Hans Prizhorn, célèbre pour ses études sur l'art produit par les cliniquement fous. Ma mère a toujours catégoriquement refusé de me parler dans sa langue. Le sujet du film m'est donc très proche, mais je n'ai pas voulu faire un film sur ma mère. Je voulais plutôt, à travers une succession de non-dits, monter l'émotion d'une redécouverte de l'amour mélangée à celle d'une retrouvaille avec un pays et surtout une langue maternelle. Un film sur la réunification de Martha et l'apprentissage de Jo."
Barbet Schroeder a confié le rôle de Martha à Marthe Keller qui a témoigné d'un investissement remarquable pour le film. En effet, le rôle qu'elle tient dans Amnésia est dans une certaine mesure autobiographique puisque comme pour Martha, l'actrice a été marqué par la Seconde Guerre Mondiale avec l'exil d'une partie de sa famille en Suisse tandis que l'autre était restée en Allemagne. Passée par la prestigieuse formation de l'Actor's Studio, la comédienne a, à l'instar de Faye Dunaway que Barbet Schroeder avait dirigé dans Barfly, accepté de n'arborer aucun artifice esthétique pour le film allant jusqu'à aller chercher elle-même les vêtements qu'elle porte dans des boutiques vendant des vêtements usagés au kilo.
Bien que se déroulant au début des années 1990, Amnesia n'a pas été conçu par son réalisateur comme un film d'époque. Pour ce dernier, le plus important surtout était de se focaliser sur le contexte de la réunification de l'Allemagne et de l'émergence de la musique électronique. Ainsi hormis quelques voitures, l'équipement musical électronique et la machine à piles pour les cassettes, le film ne présente aucun autre signe de cette époque.
Barbet Schroeder a souhaité que le décor de son film soit le plus réaliste possible comme il déclare : "Dans l'austérité et la beauté de la maison, le placement bien en vue de certains éléments (la bonbonne de gaz orange, la tapette à mouches aux couleurs vives, le sac plastique blanc sur le mur) nous a permis, à l'instar de notre refus des bougies, de nous immuniser contre la création d'un décor trop académiquement parfait et esthétisé en y faisant rentrer des traces de vie quotidienne, authentiques et surprenantes."
Barbet Schroeder s'est entouré pour Amnésia d'une équipe de collaborateurs fidèles l'accompagnant depuis plusieurs films à l'image du directeur de la photographie Luciano Tovoli, de la monteuse Nelly Quettier ou de l'ingénieur du son Jean-Paul Mugel.
Amnésia se déroulant à Ibiza, Barbet Schroeder s'est adjoint les services d'un DJ local pour composer la partition originale de son film, Lucien Nicolet alias Luciano. Grande figure de la musique à Ibiza, c'est la première fois qu'il compose une bande originale pour le cinéma.
Le film a ceci de particulier qu'il est le premier film européen à être tourné en 6K comme l'explique le réalisateur : "Amnésia est le premier film européen en 6K. Ce n'est pas que sa définition soit trois fois supérieure à celle du 35mm qui est important, mais le fait qu'elle permette de multiplier à l'infini les possibilités de montage à l'intérieur d'une même image et de faire des manipulations inouïes."