"Ghost in the shell", bien plus qu'un univers de cyberpunk, est une réflexion sur la nature humain et sur la technologie. Comme toutes œuvre cyberpunk me direz-vous ; mais l'univers créé par Masamune Shirow et sublimé par Mamoru Oshii va plus loin.
Autant que je puisse en juger, j'ai vu à peu près tout ce qui était possible de voir sur l'univers de "Ghost in the Shell" ; des mangas aux films animés, en passant par la série et les OAV. Est-ce que ça fait de moi un expert ? Absolument pas ! Mais plutôt un connaisseur, un amateur dans le sens premier du mot.
En tant qu'amateur donc, qu'est-ce que j'attendais de cette nouvelle adaptation, la première en film dit "live" ?
J'en attendait surtout du respect ; mais pas forcément de l'histoire des autres médias, je pensais surtout à la problématique, et par extension aux personnages.
Ghost in the shell est un monument du cyberpunk, un sous-genre de la Science-Fiction qui a ses codes particulier. Le problème de ce film est qu'il ne répond pas assez à ces codes qui font la richesse de l'univers. L'aspect technologique qui est un élément clé de l'univers de GITS (pour les intimes) n'apparaît vraiment qu'au début pour se faire beaucoup plus discret par la suite, ce qui affaiblit autant l'intrigue que les personnage. Alors ce film, c'est quoi ?
La recette est assez simple : vous prenez la quasi intégralité des situations du premier film, vous y ajouter une pincé d'élément du second "Innocence", vous prenez un personnage sorti de "Stand Alone Complex" sans aucunement tenir compte ni de son histoire propre, ni de ses caractéristique de la série ; vous mixez le tout et vous le recouvrez avec une histoire originale. Comme j'en avais grandement peur au visionnage des bandes-annonces, ce film est un infect et incohérent gloubiboulga de l'univers entier qui ne tient pas vraiment compte de ce qui a été fait précédemment. Mais ce n'est pas si grave, car entre les films d'Oshii, la série, les OAV "Arise" et les mangas originaux, cet univers est habitué aux incohérences et aux "reboot" en tout genre.
Ma première et plus importante inquiétude concernant ce projet était le non respect de l'aspect purement philosophique pour en faire un simple film d'action. Heureusement, ce n'est pas tout à fait le cas même si on sent que c'est venu à l'esprit des auteurs. Fort malheureusement, le film passe à côté de la vraie problématique de l'univers qui est principalement un questionnement sur l'humanité et qu'est-ce qui fait que nous sommes humain.
Le film est trop centré sur le major et par extension sur Bâto, mais le reste de la section 9, avec toute la problématique que ce melting pot implique, est quasi inexistant. Même Aramaki est relégué au rang de simple membre dont on ne voit pas vraiment qu'il est bien plus que simplement au commandes, et Togusa est anecdotique ainsi que les autres membres de la section 9, quasiment absent et insipides.
La comparaison Homme/Machine, très largement apportée par Togusa et Aramaki dans les autres œuvres, n'est applicable qu'avec le major
puisque dans cette histoire, elle est la première de son genre.
Aussi, le film est totalement centré sur elle et sur l'histoire avec Kuze plutôt que sur la relation homme/machine, ce qui est une grosse erreur puisque ça dénature la problématique et la rend beaucoup moins puissante
Cependant, cette nouvelle histoire est loin d'être mauvaise et elle ose faire ce que peu ont travaillé avant :
l'origine story de Motoko. Elle aborde vraiment sa "naissance", et faire d'elle l'unique spécimen de son genre, de l’isolé, est une très bonne idée malgré les défauts que ça apporte.
Malheureusement, on passe à côté de beaucoup de questionnement sur la nature humaine car l'action et l'enquête prennent trop d'importance. Le fait d'avoir mis le personnage de Kuze permet d'apporter un antagoniste qui fait office de miroir face au major, mais il n'a que trop peu d'importance réellement
face à la magouille de la société mère.
Côté casting, Scarlett Johansson joue le rôle ; mais malheureusement elle fait du Scarlett Johansson et ne correspond pas tout à fait au rôle. Trop douce, avec un visage trop angélique, pas assez anguleux et dur. Pilou Asbaek qui joue Bâto est plutôt bon mais pas assez buriné par rapport au personnage d'origine. Micheal Pitt est mauvais, presque anecdotique ; et Takeshi Kitano, dont on attendait beaucoup, joue bien mais son personnage est mauvais. La plus grande arme d'Aramaki dans l'oeuvre globale de GITS est son intelligence, qui lui fait utilisé son influence avec brio et toujours avec justesse. Le voir ici comme un personnage extrêmement secondaire ; qui se sert tout bêtement de son arme alors que ça ne colle absolument pas avec le personnage en fait un atout considérablement dévalué et insipide. Pour moi, le meilleur acteur est Chin Han qui joue Togusa...mais qu'on ne voit qu'à peine 3 minutes dans le film.
Quand aux autres personnages, ceux qui ne font pas vraiment partis de l'univers de GITS, Juliette Binoche en tête ; eh bien ça se sent vraiment qu'ils ont été comme rapportés dans ce film et ne collent pas vraiment avec le reste du cadre.
La mise en scène est pas mauvaise sans être transcendante. Le film se veut fluide et l'histoire est compréhensible ; mais trop d'actions et d'évènements en tous genres viennent trop souvent désamorcer des situations où la réflexion et la philosophie se mettent en place. Des situations qui manquent cruellement au film.
Au final on ne peut pas dire que ce nouveau "Ghost in the Shell" soit un mauvais film mais il passe à côté de la véritable problématique qui est propre à son univers. La problématique a été simplifiée pour en faire un film plus accessible pour le grand public. C'est un mal pour un bien me direz-vous mais je ne peux m'empêcher de ressentir un vide dans ce film. Cependant, il faut bien comprendre que je suis un très très grand admirateur de l'univers d'origine, alors que ça crève les yeux que ce film a été pensé pour les gens qui ne connaissent pas ni les mangas ni les animés. Les "newbies" seront certainement intéressé et conquis par l'univers qui a été mis à leur portée ; mais le non-initié verra tout de même la construction très erratique du film avec quelques incohérences et absurdités. Les initiés seront comme moi ; ils resteront sur leur faim avec une sensation de vide. Je ne peux cependant que vous conseiller de voir ce film afin de vous faire votre propre idée. Mais après, vous devriez regarder le chef-d’œuvre de Mamoru Oshii de 1995.