"La vie ne tient qu'à un fil."
Sans doute le jeu de mot qu'on a envie de déballer quand on sort de The Walk, biopic étonnamment léger, armé d'une force pleine de fougue, et se couvrant sous l'apparat d'une fable, d'un hymne à la persévérance et, parfois même, à la folie qui, selon Zemeckis, permet d'être sensé...
C'est donc dans un New York des seventies que Philippe Petit, funambule cynique et railleur, "tend son fil" dans la quête de la vie. Il la choie, l'adore, la remercie, et se précipite vers les tours jumelles du World Trade Center comme vers une maîtresse, une inspiration d'une grande profondeur artistique. En effet, on parle ici "d'art d'être en suspens"; il est vrai que le geste, la tension, la vie qui perd de sa solidité effraie et, en un sens, excite. Cependant, c'est peut-être la souplesse du corps que Joseph Gordon-Levitt ne transmet pas entièrement: la 3D (fantastique) nous fait trembler, on s'agrippe au fauteuil, on adore la séquence finale; mais on ressent l'angoisse du fil et pas la magnificence du geste. Détail, seulement...
Ce qui marque aussi, c'est la singularité du rythme, le scénario est léger, facile, sans être suffisant; ses personnages sont agréables, et aucun pathétisme ne déteint sur leur humeur fraîche. Et l'idée phare du film, c'est le doute humain. Philippe veut, mais il ne sait pas s'il pourra. Il confronte sa volonté à lui-même. Dans ce sens, le film est surprenant, dans la mesure où sa simplicité implique une certaine philosophie, sans être lourdaude. Un divertissement intelligent et détendu, ça fait du bien!
On aime The Walk pour sa franchise, les frissons qu'il nous procure, sa facilité pétillante, seulement, un nuage vient contrarier la marche de Gordon-Levitt: la substance. Si de très réussis panoramas affinent la mise en scène, on cherche sans le savoir la pâte, ce qui fait que c'est de Zemeckis. Distrayant, oui, comme Retour vers le Futur, mais l'élan artistique, la maîtrise du récit semblent absents. Ce qui donne à certaines scènes des allures de discussions insignifiantes. Sentiment heureusement vite oublié car la troupe du funambule reprend aussitôt sa course, et nous enlève avec lumière.
The Walk, donc, est entre deux genres: le biopic intrinsèque et le thriller palpitant. Ce curieux mélange nous aborde tout de même avec une insouciance depuis longtemps perdue de vue. Saisissant, et littéralement à couper le souffle!