Selon la réalisatrice Catherine Corsini, le film sera très différent de son précédent. Il s'agira d'un film "solaire" : "tous les personnages sont des gens plutôt bons. Dans Trois Mondes, il y avait beaucoup de mauvais sentiments, de culpabilité. Là, il y a des problèmes d’affect mais ce sont des gens qui sont assez courageux et qui sont confrontés à leur désir et comment ils vont réussir à les vivre."
Izïa Higelin remplace Adèle Haenel, dont la participation au film avait été annoncée dans un premier temps.
En plus de mettre en scène une histoire d'amour, Catherine Corsini souhaitait, à travers ce film, rendre un hommage appuyé au féminisme et notamment à ces femmes qui se sont battues pour le droit à l'avortement et la libération sexuelle. D'où l'intérêt d'ancrer cette fiction au coeur des années 70 : "je me suis vite rendu compte que beaucoup des acquis sur lesquels je vis aujourd’hui, on les devait à ces femmes (...). Il y avait une vitalité, une insolence dans le mouvement féministe qui m’a séduite. Je ne vois rien aujourd’hui de comparable. J’ai compris que le féminisme mettait l’humain au centre, et ça a été le grand principe de l’écriture du film."
Pour rendre La Belle saison aussi réaliste et authentique que possible, la réalisatrice s'est énormément documentée sur les mouvements féministes des années 70. Ainsi, elle a visionné de nombreuses vidéos de Carole Roussopoulos, qui a notamment filmé le premier défilé homosexuel ayant eu lieu le 1er Mai 1970. Elle a également regardé des films militants que cette dernière avait coréalisé avec Delphine Seyrig. D'ailleurs, les prénoms des deux héroïnes du film, sont des hommages à ces deux ferventes défenseures des droits des femmes.
Etant donné qu'il s'agit ici d'un film d'époque, l'un des enjeux de la mise en scène était d'éviter au maximum que les décors et les costumes puissent trop s'identifier aux années 70. Ainsi, l'équipe artistique a très vite opté pour l'idée d'inclure des éléments modernes et d'autres plus anciens, toujours dans un souci de vérité comme en témoigne la cinéaste : "on a souvent tendance dans un film d’époque à tout « décorer » dans les années où le film est situé mais il y avait pleins de gens en 70 qui s’habillaient encore comme dans les années 50, et chez qui les papiers peints dataient. Mon obsession était de ne pas être dans une reproduction rigide des actions féministes (...). Je voulais d’abord être dans la vitalité de cette période historique."
Catherine Corsini souhaitait également accorder beaucoup d'attention au peu de personnages masculins du film, comme celui de Manuel, le compagnon de Carole. En effet, celui-ci permet notamment à cette dernière d'être confrontée à ces propres contradictions, en lui faisant remarquer que bien qu'elle se bat pour la liberté des femmes, elle devient complètement dépendante d'une jeune fille dont elle tombe amoureuse: "La Belle Saison est un film avec des femmes, autour du mouvement des femmes, avec une histoire d’amour entre deux femmes… Je ne voulais pas d’hommes mesquins à côté. Je voulais qu’ils soient attentifs aux femmes et ne soient pas que des antagonistes. Comme le dit Carole au début : « On n’est pas contre les hommes, on est pour les femmes."
Concernant l'écriture du scénario, l'une des grandes questions que s'est posée la réalisatrice était de savoir comment lier un sujet historique et social à un parcours intime de deux personnages : "Comment peut-on s’engager politiquement, être courageux pour les autres et en revanche avoir du mal à défendre « sa cause » dans la vie privée. Cette opposition me parlait profondément et ramenait de la fiction, de la dramaturgie."
A l'origine, Catherine Corsini n'avait pas nécessairement l'intention de filmer la liberté des corps telle qu'elle apparaît dans le film. Elle souhaitait d'avantage rendre compte de la beauté sauvage de la nature et composer une image qui se rapproche des peintures de Manet. Mais la sensualité que dégageait Cécile De France, après ses essais costumes et coiffures l'a convaincue de mettre en avant la beauté de la nudité, qui correspondait d'ailleurs parfaitement à l'esprit de cette époque, où les femmes se libéraient peu à peu.
La Belle saison a été l'occasion pour la réalisatrice de replonger dans sa propre enfance, puisqu'elle a elle-même grandi à la campagne : "Je voulais mettre en parallèle le côté bouillonnant de Paris et celui, intemporel, de la campagne. Comment allier ces deux mouvements dans le film ? Comment ces mondes vont glisser l’un vers l’autre, se faire écho, se contaminer ?"
En ce qui concerne l'histoire d'amour, Catherine Corsini tenait à ce que ses deux personnages aient un certain rayonnement, une générosité palpable. Qu'elles soient humainement, de belles personnes. Malgré cela, il était incontournable de créer des enjeux dramatiques forts avec des : "zones d’ombres et de conflits. Mais ceux-ci sont intérieurs aux personnages. On sent bien que le premier ennemi de Delphine, c’est elle-même. Sa mère est un obstacle certes, mais Delphine n’ose pas l’affronter, comme elle n’ose pas affirmer son propre désir. La façon dont Delphine fantasme d’une certaine manière la toute-puissance de sa mère, c’est ça qui rend le drame plus douloureux."
Pour ce qui est du personnage de la mère de Delphine, Noémie Lvovsky devait absolument éviter toute caricature afin de rendre son attitude la plus violente possible comme en témoigne la réalisatrice : "C’est la peur qui fait réagir la mère si violemment. Peur devant l’inconnu qui lui semble inconcevable et anormal : l’homosexualité de sa fille. Pour pouvoir jouer cette scène-là, il lui a fallu au préalable déjouer les stéréotypes de la mère acariâtre. Les acteurs sont un peu les metteurs en scène des films. Pour arriver à faire croire à leur personnage, ils ont besoin de construire quelque chose."
Catherine Corsini a souhaité utiliser des musiques de chanteurs des années 70, comme Janis Joplin ou Joe Dassin, mais également des morceaux créés par des groupes plus actuels comme The Rapture, afin d'exprimer notamment : "la modernité que Carole apporte dans cette campagne. Et puis il y a la musique originale de Grégoire Hetzel qui amène du lyrisme et épouse les sentiments intérieurs de Delphine et Carole, la façon qu’elles ont d’être prisonnières d’elles-mêmes par moments."