En 1971, Catherine Corsini avait 15 ans. Elle n'a donc pas directement participé aux luttes des féministes de l'époque. Mais, indéniablement, ces luttes l'ont marquée. Au point de situer "La belle saison", son dernier film, très précisément à cette époque. Son film raconte la rencontre entre Delphine et de Charlotte. Delphine est une jeune femme venant du monde paysan de la Creuse, elle s'est très vite aperçue de son attirance sentimentale et sexuelle pour les personnes de son sexe et il lui est quasiment impossible de vivre une relation sérieuse avec une autre femme dans l'environnement qui est le sien. Carole est professeur d'espagnol et elle lutte avec acharnement pour la cause féministe. A priori elle est hétéro et elle est d'ailleurs en couple, et heureuse, avec Manuel. Lorsque Delphine quitte sa campagne pour rejoindre Paris où elle pense pouvoir disposer de plus de liberté, les 2 femmes vont se rencontrer par hasard et elles vont finir par s'aimer. C'est cette relation que filme Catherine Corsini, dans un film produit par sa compagne Elisabeth Perez. Le champ embrassé par "La belle saison" est vaste puisqu'on y passe des AG féministes de la capitale aux problèmes du monde paysan dans la France profonde. A Paris, les hommes que montre le film se montrent compréhensifs avec les luttes menées par leurs compagnes, quand bien même ils n'y participent pas directement. Des femmes qui affirment ne pas être contre les hommes, mais pour les femmes et qui pensent que la présence des hommes à leur côté n'est pas souhaitable car, en présence d'hommes, elles ont tendance à se censurer. Dans la Creuse, toutes les décisions sont prises par les hommes, les femmes qui travaillent dans les fermes n'ont pas de salaire et pas de couverture sociale. Après tout, pourquoi avoir leur propre salaire puisqu'elles peuvent piocher dans celui de leur mari ?!! Le film montre aussi le dilemme qui peut se poser entre un sentiment amoureux et un sentiment de devoir moral par rapport à ses parents, par rapport à sa terre. Cécile de France et Izïa Higelin interprètent magistralement les rôles de Carole et de Delphine. Le reste de la distribution (Kévin Azaïs, Benjamin Bellecour, ...) est tout aussi excellent. Même Noémie Lvovsky qui joue le rôle de la mère de Delphine arrive, pour une fois, à être sobre et, pour une fois, trouve grâce à mes yeux. On remarque aussi le beau travail de Jeanne Lapoirie en ce qui concerne la photo et l'utilisation de musiques qui collent bien à l'époque (Janis Joplin, Colette Magny, Joe Dassin). Un petit reproche toutefois : même si cela ne va pas aussi loin que dans "La vie d'Adèle", il y a quelques longueurs inutiles dans le film.