Un film qui me laisse pantois... Le seul trailer que j'en avais vu montrait le miroir dont il est question former "en lettres de sang inversées", le tout narré par la jeune actrice et entrecoupé par différentes scènes du film. Une première déception de ne voir justement aucun effet du style. A la vue de cette bande-annonce, je m'étais attendu à quelque chose dans le goût de la "Chambre 1408" (en ce sens que le miroir allait avoir un rôle en tant que tel, être un vecteur d'effroi, d'être lui-même une menace directe, que l'histoire allait graviter autour de ses interventions), ce qui n'est pas le cas.
Au niveau de la construction du scénario... Eh bien, la tension proposée par l'entremêlement des deux trames dans le temps n'a pas eu son effet sur moi, du moins, pas tout le film. Passée la scène de la pomme, j'ai commencé à décrocher, le film ne se met alors à ne plus rien proposer comme contenu constructif, ce qui était le cas jusqu'alors (l'histoire du miroir, les victimes, le déchirement de la famille, l'effondrement mental de Tim [j'y reviendrai plus bas], les effets les plus saisissants ; tout cela se fait dans la première moitié du film... au delà, il n'y a plus que courses-poursuites, jumpscares et quelques scènes assez "banales"). De plus, j'ai trouvé que les "fantômes" (à défaut d'autre mot) étaient mal amenés ; puisque "la dame du bureau" est proposée dès l'ouverture du film, ils ne sont plus du tout un élément de surprise par la suite, d'autant plus qu'ils ne sont pas eux-mêmes une menace...
Je vais tenter d'éviter les spoilers, au cas où, mais la fin est typiquement le genre de fin que j'apprécie, mais...
je trouve qu'elle a été gâchée ici. Tim, au moment de faire le "geste décisif", est censé à ce moment-là être dans une tension psychologique des plus violentes, et bascule dans une pulsion qu'il dit tout au long du film vouloir éviter, puisque de toute façon le minuteur s'en serait chargé à sa place. Cette tension n'est pas du tout retranscrite, et
la fin devient alors complètement obsolète, imprévue et limite hors de propos, car beaucoup trop brutale par rapport à ce que le film proposait jusque-là. Un rien de finesse, ou l'amener différemment, par une autre approche, aurait probablement eu un effet beaucoup plus marquant, parce que mettant un point définitif sur la trame psychologique de Tim.
Par rapport au jeu d'acteurs... La ligne narrative "du passé" s'en sort très bien je trouve, avec du recul, la jeune actrice jouant Kaylie est convaincante, ainsi que les deux rôles des parents, qui transmettent bien tous les deux le versant psychologique de leurs personnages, tous les deux dans une folie différente et évoluant correctement (furieuse et violente pour l'une, froide et mécanique pour l'autre). Par contre, j'ai trouvé très plat le jeu des deux acteurs de la ligne narrative "du présent", tombant dans des expressions faciales et corporelles extrêmement vides à des moments inopportuns. Autant je peux comprendre qu'à certains moments, où les personnages sont perdus dans leurs pensées, ils aient un visage des plus absents et les yeux dans le néant le plus complet, autant je ne comprends pas le fait d'avoir adopté ce comportement dès le départ. Dans l'une des premières scènes, où Kaylie découvre le miroir à cette vente aux enchères, c'est le cas. Dans la plupart des dialogues entre frère et soeur, ils se fixent comme des veaux morts, sans aucune expression, alors que, justement, c'est à ce moment qu'est censée naître l'espèce de rivalité qu'ils auront jusqu'aux premiers événements paranormaux. Les personnalités des deux sont effectivement à peine brossées, mais le jeu d'acteurs aurait pu mettre plus de conviction dans ce que chacun des deux pensait. L'obsession de Kaylie tient à peine debout au niveau scénaristique et est interprétée gauchement, rendant le personnage parfois aux limites du grotesque ; les tentatives d'explications, de rationalisation et surtout les colères de Tim envers sa soeur ne sont pas mieux...
En définitive, Oculus sera pour moi une belle déception, d'autant plus marquée par le fait qu'il ait été encensé par la critique et qu'il ait été primé. De bonnes scènes sont à retenir, mais noyées dans des scènes trop longues, trop lourdes, déjà vues, et surtout par les interprétations plates des deux acteurs principaux, alors que les acteurs secondaires s'en sortent à merveille.