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Olivier Barlet
299 abonnés
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5,0
Publiée le 3 avril 2014
Ces mille horloges, ces mille soleils, ces mille fulgurances nous émeuvent profondément à la faveur d'un film aussi nocturne que lumineux, aussi intuitif qu'ancré dans le temps présent, aussi digne de s'inscrire dans la lignée qu'il est novateur et puissant. Avec Mille soleils, Mati Diop revisite avec une infinie finesse le programme de Touki bouki : conquérir sans abandonner.
Je ne comprends ni la presse dithyrambique ni le succès en festivals et la sortie salles. C'est un documentaire assez mal réalisé en réalité (accumulation de plans sans force, esthétisants, rythme étiré inutilement), sans puissance dramatique ni poétique, sans réel regard sur les gens filmés, juste un objet ennuyeux et chichiteux. Sur 45 longues minutes, la seule vraie scène forte et qui raconte enfin quelque chose du héros arrive très tard et le film n'en fait rien (refus poseur de raconter une histoire). Mais surtout il y a ce sentiment très dérangeant d'un regard condescendant et pittoresque sur les êtres que la réalisatrice filme (avec l'alibi qu'ils soient des proches), d'une fascination malsaine. Fantasme pervers de blanc qui ne filme jamais réellement des "personnages" littéralement mis en scène et poussés à figurer dans un cadre étriqué.
En 1973 Djibril Diop Mambéty tournait "Touki Bouki", une version sénégalaise et bon enfant de Bonnie and Clyde. La scène finale voyait les deux amants se séparer : Anta embarque à bord d'un grand paquebot blanc tandis que Mory reste, seul, sur les quais. Quarante ans plus tard, la propre nièce du réalisateur mène l'enquête : que sont devenus les deux acteurs ? Magaye Niang est resté à Dakar. La documentariste l'accompagne pendant 24 heures - et 45 minutes. Il est l'invité d'honneur d'une projection en plein air de "Touki bouki" dans les rues de Dakar. Les spectateurs sont fascinés par ce témoignage du passé. Mais Magaye Niang, qui a sombré dans l'alcoolisme, arrive en retard, après s'être fait rabrouer par un chauffeur de taxi qui lui reproche sa passivité. le lendemain il appelle Anta qui vit désormais aux Etats-Unis.
"Mille soleils" déroute par sa durée inhabituelle. 45 minutes : trop court pour s'installer vraiment dans l'histoire, trop long pour ne pas s'y attacher. "Mille soleils" interroge le déracinement. Film sénégalais, tourné dans la moiteur de la nuit dakaroise, il a une portée universelle : faut-il mieux partir ou rester ? que laisse-t-on derrière soi ? où est son chez-soi ?