Je m'étonne que ce film soit autant encensé (surtout comparer à des films qui ne reçoivent malheureusement pas le même enthousiasme de la critique et des spectateurs d'allociné tel que le quasi chef d'oeuvre "Les Nouveaux Sauvages" de Damian Szifron). Je m'explique : ce film est très bon, la mise en scène est soigné (mais rien d'original non plus, le fait de filmer au plus près les instruments, la bouche des trompettistes, la sueur, n'est pas du génie, juste du talent). L'histoire fait tout l'intérêt de ce film, histoire exceptionnelle. Mais après l'émotion, il faut faire place à plus d'esprit critique. Le film n'est pas exempt de défaut. D'abord, l'histoire de la petite copine n'a aucun intérêt, elle ne sert à rien, et on s'en passerait bien ; plusieurs incohérences se manifestent dans le scénario (par exemple, comment le type peut livrer son meilleur solo comme par magie alors qu'il ne s'est plus entraîné depuis des semaines ?) ; ensuite le côté trop explicite et non sous-entendu du discours de Terence Fletcher. Enfin, ce qui m'a gêné le plus finalement (et là je vais volontairement spoiler mais c'est nécessaire), c'est vraiment le fond du discours de Fletcher, qui part d'un mauvais point de vue. S'il n'y a plus de Charlie Parker, ce n'est pas parce que les musiciens ne savent plus jouer, c'est surtout du fait de la baisse de l'inspiration musicale. En gros, ce que je veux dire, c'est que ce ne sont pas les skills comme disent les américains (capacités et habilités) des musiciens qui font leur génie, c'est leur idée, leur génie propre. Fletcher cite sans cesse Charlie Parker mais ce type de jazz, le be bop, a correspondu à un certain jazz, ultra rapide, rythmé de manière démentielle. D'autres musiciens comme Miles Davis avaient moins de capacités mais une autre forme de génie. D'ailleurs, Fletcher dit que le jazz agonise mais cela est dû certainement moins à la capacité instrumentale des musiciens qu'à un essoufflement de l'inspiration, du génie mélodique et harmonique des individus. Le film se concentre uniquement sur les problèmes de rythmique et de tempo, Fletcher oublie juste que la musique ce n'est pas que les solos de batterie ultra-rapides, c'est aussi la subtilité, l'invention de la mélodie. Charlie Parker a certes bossé à fond, mais uniquement dans le but de pouvoir jouer ce qu'il avait en tête : ce n'est pas le contraire qui se passe !! Et finalement on ressent quand même plusieurs fois un malaise dans le film car il y a d'autres manières d'enseigner la musique et de corriger les erreurs des musiciens que de hurler à la mort sur un musicien en le traitant de tous les noms de la terre, en s'en prenant à sa famille etc. D'ailleurs, le scénario est plutôt ambigu sur Fletcher, puisqu'au final, il aura été sadique jusqu'au bout.