Extraordinaire ! Ou plutôt devrais-je dire extraordinaires ! Avec un « S ». Parce que "Stan & Ollie" offre un rôle de tout premier choix à Steve Coogan et John C. Reilly. Le genre de rôle qui ne s’offre qu’une fois… et qui ne représentera jamais. Le genre de rôle de toute une carrière. Le genre de rôle qui vous donne la sensation de toucher le Graal, sans que ce soit automatiquement récompensé par un prix de renom ou quelconque. Quoiqu’un prix n’est jamais vraiment quelconque, me direz-vous et vous aurez raison. Ceux qui me suivent régulièrement savent à quel point j’attache de l’importance à ces rôles de composition. Tout simplement parce que ce sont les plus difficiles à jouer, tant ils demandent du travail pour rendre une copie la plus parfaite possible.. Eh bien chers lecteurs, chères lectrices, je confirme tout le bien de ce que j’avais aperçu à travers la bande-annonce diffusée dans l’indifférence générale d’un hall de cinéma : Steeve Coogan et John C. Reilly ne sont pas uniquement parfaits, mais ils sont purement et simplement magistraux. Littéralement en état de grâce, ils se sont non seulement appropriés les personnages, mais en plus ils SONT DEVENUS Laurel et Hardy !!! Pour commencer, la ressemblance physique est absolument bluffante. Certes, le maquillage y est pour beaucoup aussi, en particulier sur John C. Reilly (kilos à rajouter obligent), au point que j’ai bien cru par moments que le duo comique opérait là un retour aux affaires alors que cela ne peut être en aucun cas possible. Ecoutez c’est simple, tout y est : les mimiques, la gestuelle, le regard… tout ! On retrouve même la précision chirurgicale des sketches, pour lesquels tout était absolument millimétré. Et c’est là qu’on se rend compte que la mise au point de ses sketches relevait du génie. Et pourtant ce sont bien des acteurs qui ont su relever ce défi, se mettant en jambes (si j’ose dire) avec un premier texte hyper dense au cours d’un énorme travelling. Oui c’était un défi parce que franchement, interpréter ces deux vedettes incontournables d’avant-guerre, beeeeen… moi je croyais que c’était tout bonnement impossible. En y réfléchissant, il est vrai que Robert Downey Jr. avait revêtu le costume de Charlie Chaplin avec brio… Bref ! Il n’empêche que le pari était franchement osé. D’autant plus risqué que l’histoire s’intéresse plus précisément à l’évolution de la paire en 1953, au moment même où les deux compères essayaient tant bien que mal de donner un nouvel élan à leur carrière pourtant déjà prestigieuse. Prestigieuse ? Absolument ! Jeunes spectateurs de fin XX ème début XXI ème siècle, jetez donc un œil sur le synopsis. Mieux : cherchez sur la toile. Cherchez et observez. Ou alors ne ratez pas le début du film, du fait qu’il présente (certes sommairement) les personnages à la veille du virage de leur carrière. Ces derniers apparaissent sur un plan particulièrement audacieux et inventif : ils ont beau être de dos, ils sont réunis face à face à gauche et à droite par un astucieux jeu de miroirs, séparés par un porte-manteau qui matérialise le juste milieu de l’image, comme si celle-ci se reflétait à l’identique, mais avec des silhouettes inversées. Enfin bon, ce serait dommage de rater ça. Pour en revenir au début, déjà dès le générique du début on remarquera la couleur rouge du rideau (prouvant au passage que c’est un film bien d’aujourd’hui) tandis que le contour du tableau se dessine selon le design d’antan mais animé selon la technologie moderne. En dépit d’un début un peu brouillon qui empêche de faire entrer le spectateur dans l’histoire tout de suite, l’illusion finit par opérer et emporter le spectateur dans une tournée méconnue, celle de la dernière chance, ou celle de la dernière pige. C’est selon le point de vue. Basé sur le livre d’AJ Marriot, (« Laurel & Hardy : The British Tours »), le film de Jon S Baird nous montre ces monstres sacrés dans leur dimension humaine. Finalement, ce sont des gens comme vous et moi, animés par une passion commune et par une amitié dont eux-mêmes prendront conscience lorsque Laurel & Hardy sans Stan n’est plus Laurel & Hardy, tout comme Laurel & Hardy n’est plus Laurel et Hardy quand Hardy manque à l’appel. Oui c’est parfois émouvant, oui c’est parfois très drôle (oh ! le gag de l’hôtel ! j’adore ! ou celui de l’œuf dur hihihihi !), mais bon sang que ces deux personnages sont attachants ! Alors quand en plus la musique donne un « la » parfaitement accordé, pourquoi bouder son plaisir ? Je trouve seulement dommage, pardon… déplorable qu’un tel film ne soit pas distribué dans plus de salles et n’ait pas bénéficié d’une meilleure promo. Le duo de comiques méritait qu’on s’intéresse à lui. Parce qu’on a beau dire ou beau faire, aimer ou pas, il fait partie intégrante de l’histoire du cinéma. Et si je dis ça, c’est en toute honnêteté car je n’étais pas un grand fan de ces deux fanfarons. Aussi je pense que ce film méritait un autre traitement, en tout cas davantage médiatisé, et bien plus distribué car après tout… eux aussi nous ont laissé un sacré héritage. On leur devait bien ça !