Ah moi je l’aime bien ce Robert Zemeckis… L’air de rien, ce mec est responsable de films très marquants dans la culture populaire (« Retour vers le futur », « Qui veut la peau de Roger Rabbit ? », « Forrest Gump »), de même qu’il témoigne toujours d’une véritable sensibilité dans sa mise en scène. Et pourtant ses films sortent sans que jamais son nom ne soit vraiment mis en avant. Dommage parce que pour moi, le nom de Zemeckis est plus que vendeur. La preuve, quand j’ai appris que c’était lui qui était aux commandes de ce « Bienvenue à Marwen », je me suis précipité pour le voir… Seulement voilà, en le voyant ce « Bienvenue à Marwen », je me suis soudainement rappelé que Robert Zemeckis, c’était aussi le réalisateur de films comme « Le Pôle Express », « Flight » ou encore le récent « The Walk ». Bref, des films pas forcément honteux, mais des films quand même bien dégoulinants et pas très subtils dans le discours. Pourtant ça commençait bien. L’introduction était malicieuse, techniquement habile, et surtout très intrigante pour la suite. Mais à peine cette introduction fut-elle finie que le film enchaîne sur le quotidien de Mark qui, lui, n’a clairement pas eu la chance de bénéficier de la même inventivité formelle. Mise en scène classique. Musique mielleuse comme on en trouve malheureusement trop souvent dans les films de Zemeckis. (En plus – pas de chance ce coup-ci – Alan Silvestri, peu inspiré, pompe le « Killing Fields » de Mike Oldfield de manière assez disgracieuse.) Et, pire que tout, Zemeckis et Thompson n’ont rien trouvé de mieux pour nous faire l’exposition de la situation que de faire parler le héros avec lui-même. Ça n’aurait pu être qu’un problème passager, mais malheureusement, cette scène-là, c’est elle qui va donner le ton de tout ce qui va suivre. A partir de ce moment, le film se retrouve en panne sèche d’inspiration. La mécanique revient tout le temps à l’identique sans parvenir à s’enrichir. Vie réelle et vie fantasmée se répondent en posant systématiquement les mêmes problématiques. Mark va-t-il surmonter ses angoisses ? Mark va-t-il oser se confronter à ses anciens agresseurs ? Mark va-t-il oser avouer sa flamme à Nicol ? A chaque fois les saynètes à base de poupées intègrent les éléments de la vie réelle de Mark afin que celui-ci s’en serve pour surmonter ses défis. Le problème c’est que ces saynètes ont beau être jolies et techniquement pertinentes, elles n’en restent pas moins dramatiquement pauvres, simplistes, et peu évolutives. Alors d’accord, j’entends que ce choix a certainement été dicté par la vraie histoire de Mark Hogancamp dont ce film s’inspire. Seulement ce choix je le trouve inefficace pour alimenter une fiction. Si j’avais eu affaire à un monde fantasmé aussi riche de sens et aussi subtil en symboles que celui du « Labyrinthe de Pan », j’aurais pu me projeter dans ces saynètes. Seulement, là, on a affaire à un personnage de gros bidasse entouré de ses groupies qui ne passe son temps qu’à vouloir tuer des nazis et sauter des « pépées ». C’est con mais, du coup, ce mec n’est pas parvenu à m’intéresser. Pire, quand il se met à parler comme un gros beauf en se rapprochant de Nicol, moi mon premier réflexe ça a été de le percevoir davantage comme une menace potentiellement dangereuse pour la jeune-femme plutôt que comme un personnage touchant et attachant qu’on a envie de voir s’en sortir. Et que le film affiche ce type de personnalité là à son personnage central, sans que ça ne suscite la méfiance chez toutes ces femmes qui l’entourent, j’ai trouvé ça limite malsain. Au bout d’un moment, j’ai même fini par craindre le pire :
que la romance entre Mark et Nicol aille jusqu’au bout, sans accroc
. Heureusement, ce film a quand même eu l’intelligence de poser le seul événement pouvant donner de l’intérêt à l’intrigue (
le fait que Nicol brise le fantasme de mariage de Mark
). Seulement – premier souci – ce premier élément vraiment intéressant et dynamisant de l’intrigue ne survient qu’au bout d’une heure et vingt minutes. Et deuxième souci : cela n’empêche pas le film de rester sur une ligne assez convenue pour tout le temps restant. Pire, dans son final, Zemeckis va carrément jusqu’à se vautrer dans une forme de larmoiement assez lamentable (
Les agresseurs de Mark qui finissent en pleurs au tribunal : worst idea ever.
), ce qui ne rend clairement pas service à son film. Autant dire qu’arrivé au générique de fin, ce ne fut pas l’émotion qui m’a assailli. Plutôt le soulagement. C’était comme si je venais de finir un plat bien plus bourratif qu’affiché sur le menu. Autant dire que maintenant je m’en souviendrai la prochaine fois que je verrai le nom de Zemeckis associé à la réalisation d’un film. Je repenserai certes à « Retour vers le futur » ou bien à « Qui veut tuer Roger Rabbit ? », mais bon, j’essaierai cette fois-ci de ne pas oublier « Pôle Express », « The Walk »… et maintenant ce « Bienvenue à Marwen… »