A la fois tragi-comédie, film romantique, et oeuvre de science-fiction, "The Lobster" est l'une des plus belles réussites du dernier festival de Cannes.
Dans un futur proche, la société interdit à toute personne d'être célibataire. Si on l'est, on est envoyé dans un hôtel plutôt original. En effet, en ses lieux, chaque personne a 45 jours pour trouver l'âme sœur sinon elle sera transformée en l'animal de son choix.
Pourquoi ce titre ? The lobster en anglais signifie le homard. C'est en cet animal, que le personnage interprété par un Colin Farrell méconnaissable, souhaiterait se réincarner. Un homard vit 100 ans, selon ses propres mots.
A partir de ce scénario invraisemblable, Yorgos Lanthimos nous livre une fable d'une noirceur absolue, où l'humanité semble être réduite à son strict minimum. Dans un décor d'une immense froideur, le spectateur assiste impuissant, à une valse de pantins déshumanisés, voués à une mort certaine ou à une vie malheureuse. En reniant leur éthique pour vouloir séduire l'autre et donc rester en vie, certains célibataires trouvent un conjoint. Dans ce monde là, il n'y a point de morale. Seuls les plus manipulateurs peuvent s'en sortir.
Perdus dans les bois, "les Solitaires", des célibataires jadis condamnés à une mort imminente et ayant fui l'hôtel, essaient de survivre. Dirigés par une femme interprétée par une Léa Seydoux machiavélique, ils ne peuvent ni s'aimer ni accomplir l'acte de chair. Là encore, l'humanité semble absente. Pourtant, une improbable histoire d'amour est sur le point de naître. Oui, mais à quel prix ?
Désespéré, "The Lobster" est une puissante diatribe sur une humanité en perdition, où le conformisme triomphe de toute morale. Seules les personnes en couple représentent le bonheur. Être célibataire est une tare. Confronter toute personne seule à une mort certaine, ne fait que renforcer son côté individualiste et tend à effacer sa propre identité. Finalement, Lanthimos filme une société artificielle, toute en contradiction, à l'image d'un monde moderne où le lien social diminue, malgré la multiplication des moyens de communication.