Vu au BIFFF.
Quelque part entre la série « True Detective » et le cinéma de Fincher, « La Isla Minima » de l’espagnole Alberto Rodriguez est un pur thriller, jouant autant de ses influences, que de ses codes. Le grand vainqueur des derniers Goya choisit comme toile de fond les années sombres de l’Espagne, s’inscrivant dans une réalité où la violence et le mal sont présents aux quatre coins du pays.
Ce film policier, bien que comportant une intrigue classique, dresse, surtout à travers son duo de flics, un portrait intéressant d’une Espagne postfranquiste. Le réalisateur confronte deux oppositions de caractères. Obligés de faire équipe, les deux policiers doivent laisser leurs différents de côté afin de résoudre un double homicide. Chacun possède à la fois, une part d’ombre et une part de clarté. Que ce soit eux deux ou bien chaque habitants de cette petite bourgade isolée, tous partagent des secrets. Rodriguez décortique avec une certaine réussite, la personnalité de ses deux personnages principaux. Sans jamais les juger, il va laisser le spectateur se faire sa propre idée, donnant les clés sans jamais ouvrir les portes. « La Isla Minima » se veut être un film à tiroirs, aussi bien au travers de son intrigue, qu’au travers de son étude anthropologique.
Sans conteste, l’ambiance 70-80’s et cette photographie au ton jaunâtre, transpirant la moiteur de cette Espagne bucolique et prolétaire, touchée de plein fouet par la crise, donne un certain charme au film. Le rythme latent, posant petit à petit chaque pièce sur son échiquier véhicule une aura cabalistique particulièrement immersible, à l’image du « Zodiac » de Fincher.
Mais Rodriguez n’est pas Fincher. Malgré que le scénario soit bien huilé et ficelé, l’évolution de l’intrigue policière reste particulièrement linéaire et codifiée. Sans quelques pirouettes scénaristiques, « La Isla Minima » aurait tout aussi bien pu passer pour un épisode des « Experts » ou je ne sais quelle autre série du même genre. Le final manque d’ailleurs, lui aussi, cruellement d’impact et d’originalité. Une phrase m’apparaît d’ailleurs comme étant en totale adéquation avec le sentiment que j’ai ressenti à la fin de la séance : « Tout ça pour ça ? »