Variation sur le deuil et l’héritage d’une vie brutalement fauchée, par l’auteur des récents Dallas Buyers Club et Wild, Jean-Marc Vallée, Démolition est de ces films indéfinissables, à la fois jubilatoire et ronronnant. En effet, si le cinéaste parvient à insuffler une véritable puissance euphorisante, en certaines occasions, on pense aux séquences de démolition, évidemment, il manque aussi d’un certain panache narratif, d’une certaine volonté de réellement raconter quelque chose. Le deuil, certes, est un postulat en tant que tel, un passage presque obligé, dans une vie, que chacun vit différemment. Ici, ce même deuil semble ouvrir les yeux du personnage central, lui révélant les tenants et aboutissants de la vie par le biais d’un autre prisme, le poussant à enfin, d’abord anonymement, à exprimer ce qu’il a sur le cœur. Dans ce même temps, on pourra constater que pour notre brave homme, tout détruire à grands coups de masses représente un exutoire.
Plus une réflexion qu’une véritable dissertation, une ébauche d’idée qu’une histoire aboutie, il sera difficile de voir en Démolition l’œuvre d’un auteur digne de ce nom. Pour autant, Jean-Marc Vallée n’étant ni maladroit dans sa mise en scène ni avare en petites anecdotes, son film sera pourtant toujours agréable à suivre. Cela est sans doute aussi dû à la remarquable présence d’un Jake Gyllenhaal touchant, personnage ambigu, à la fois froid et songeur et chaleureux, sur la fin. L’acteur trouve encore ici matière à exprimer son talent discret, sa volonté d’incarner des personnages complexes, comme il le fît si bien dans le remarquable Night Call. On pourrait aussi saluer, ça ne mange pas de pain, les présences honorables d’une Naomi Watts tout en naturel et d’un Chris Cooper impeccable.
Jean-Marc Vallée ne joue jamais sur la simplicité, préférant toujours confronter ses personnages à leurs destins, les unissant ou les séparant par des évènements forts. A ce titre, mais il s’agit sans doute là d’une vision qui m’est propre, Démolition résonne toujours très juste dans les rapports humains qu’il expose. Oui, qu’importe si en définitive nous nous demandons vers quoi voulait réellement nous emmener le cinéaste, les séquences s’additionnent sans jamais que nous nous sentions floués, ou mal renseignés. Le film, en soit, est un paradoxe entre des moments intenses mais décousus et une narration globale sans relief. Curieux, donc, que de se réjouir d’un tel procédé narratif. Et pourtant. 13/20