Jean-Paul Rouve à choisi d’adapter un roman difficile à mettre en image car, tout bien considéré, cette jolie petite histoire n’a pas vraiment de fil directeur, pas vraiment de vrai message, pas vraiment d’autre intérêt que de montrer une tranche de vie : 3 générations d’une même famille chacun à un moment charnière : l’entrée dans la vie active, la fin de la vie active, la fin de la vie. Même si les 1h30 de film résonnent comme une petite parenthèse de douceur et de sensibilité, on se prend malgré tout à penser qu’il manque de structure, qu’il manque d’une vraie histoire, d’une colonne vertébrale en somme. La preuve, malgré sa durée modeste, il tire un petit peu en longueur sur la fin. Le scénario est par ailleurs assez prévisible, on devine assez vite comment les choses vont tourner pour Romain, pour ses parents, pour sa grand-mère. A partir de cela, Rouve réussi un film tendrement drôle, à travers des rôles secondaires assez joliment croqués (Audrey Lamy en directrice de maison de retraite au brushing improbable, Jean-Paul Rouve en directeur d’Hôtel débonnaire et gentiment alcoolique ou encore William Lebghil en coloc relou…), voire même des apparitions fugaces mais quasi surréalistes (le flic, le pompiste philosophe…), comme des pastilles d’humour qui parsème son film. Mais c’est Annie Cordy en vieille femme pétillante et surtout Michel Blanc qui crèvent l’écran. Bonne idée de donner à l’interprète de « Tata Yoyo » un rôle de cette qualité, et très bonne idée de confier à Michel Blanc celui de son fils maladroit. Son jeu à lui sonne hyper juste, dans ses rapports avec sa mère, ses frères, son fils, sa femme, il est juste parfait, jamais caricatural, jamais « trop » ou « pas assez », son jeu est parfaitement dosé, c’est un bonheur de voir un acteur faire une composition aussi belle que touchante. Chantal Lauby (très mignonne et avec plein de retenue) et Matthieu Spinosi complète ce casting vraiment réussi. Si la réalisation de Rouve est assez académique dans la forme, sa direction d’acteur est dans ce film une très belle réussite, et je veux le souligner. La fin du film est assez peu originale, on la voit venir de très loin là encore, elle est mignonne et tombe plutôt bien, elle évite le pathos en désamorçant les scènes délicates avec, une dernière fois, un second rôle décalé (l’ambulancier). En fait, Rouve réussi un film assez équilibré, qui traite de choses douloureuses (la dépression, la vieillesse, la mort) tout en y apportant assez d’humour pour ne jamais devenir lourd ou déprimant. Ce n’est pas un hasard s’il fait évidemment penser à « La délicatesse » de Davis Foenkinos lui-même (qui s’était auto-adapté), même si Jean-Paul Rouve à peut-être apporté au scénario la fraicheur et l’humour qui le caractérise depuis le début de sa carrière. J’ajoute pour finir que si l’affiche est somme toute assez décevante, la bande annonce est, elle, carrément réussie et la bande originale (avec des chansons classiques revisitées, notamment par Julien Doré) plutôt agréable à l’oreille. En résumé, un bon petit moment de cinéma français plein de tendresse et sans prétention.