Faites entrer l'accusé
Mention : Barbant
Est-ce que c'était nécessaire d'adapter cette affaire ? Le film fait du cinéma avec cette affaire, beaucoup trop.
Les acteurs sont bons, le rôle des avocats bien défendu et l'intrigue pas mal ficellée. Mais du reste c'est bien trop didactique. Les effets sont lourdement appuyés, la mise en scène est enlisée dans les codes fastidieux du polar. Une reconstitution hasardeuse qui sonne faux et creux.
Les vieux de la vieille (Gourmet, Vuillermoz et Nathalie Baye) font le job. Leur aisance naturelle est convaincante. Pour l’incontournable Raphaël Personnaz, il n'y a au moins pas de faute de jeu à lui reprocher. De même pour l'ensemble du casting secondaire. Adama Niane livre un Guy George presque aussi affolant qu'affolé. Quant à celui qui joue son avocat, il en fait incroyablement trop. Probablement pour être au plus près du réel avocat, très théâtral aussi. Mais pourquoi autant coller à la réalité ? Car le jeu d'Adama Niane laisse toujours perplexe.
Pour autant, le récit construit peu à peu une image de cette profession très honorable. C'est d'avantage le rôle de Maître Pons (Nathalie Baye) qui porte cet honneur. Le rôle de la défense n'est donc plus de prouver une hypothétique innocence, mais démontrer une part d'humanité chez l'accusé. Non pas pour excuser l'horreur, mais pour donner un contre-point objectif à la vision de monstre sans sentiments qui peut s'imposer.
Le film évoque assez bien, mais trop succinctement, la question des médias qui s'emparent de telles affaires. La mise en péril d'une traque ou d'une enquête, en dévoilant trop d'informations, et le sensationnalisme qui influence le jugement public comme judiciaire. Autant de débordements dangereux de ces infos en chaine, qui résonnent tristement avec notre actualité d'ailleurs.
Le fait que le récit ne parte pas simplement d'un point A pour aller au point B est pas inintéressant. Déjà ce changement d'atmosphère donne des respirations primordiales à cette ambiance très lourde. Le très long moment sans passage du procès se fait d'ailleurs sentir. Les éléments de l'enquête se répondent plutôt bien entre les phase d'enquête et de procès.
Maintenant, cette intrigue est carrément trop expliquée. Le scénario souligne vachement les évidences et empile continuellement des statistiques, des composantes propre au milieu politiquo-judiciaire. L'intention de mettre en scène l'affaire SK1 est en fin de compte de pointer l'absurdité du fonctionnement passé de la justice. C'est très ennuyeux car ça obstrue toute la singularité de l'histoire. En cela ce film n'en est jamais un, il n'y a aucun éléments de fiction, c'est juste un documentaire illustré. Hyper didactique, c'est fatiguant.
Pas étonnant donc que le film utilise les codes du polar. Tension excessivement appuyée par le son, le fond musical en particuliers bien sûr. Il y a aussi les réactions de l'assistance lors du procès qui sont consternantes. Précisément utilisée, mais ça sonne ridiculement faux. D'autant que les vrais témoignages confirment une ambiance de stupéfaction, plus qu'autre chose.
Autre combine du polar, le flic insomniaque, qui consacre sa vie à son enquête. Quel manque de réserve sur cette vision sans mesure d'un profond investissement. Indubitablement le mari ne voit plus sa femme, qui nous offre d'ailleurs une des quelques répliques absolument ridicules, quelque chose comme : « tu ne m'entend plus, pourtant je j'aime ».
L'affaire SK1 est un film raté qui ne fait que mettre en jeu, trop fidèlement, la tragédie Guy George. En somme une parodie de Faites entrer l'accusé.
Note : 8 / 20