septiemeartetdemi.com - Les acteurs qui ont joué dans la saga Harry Potter ont du mal à se désengluer de l'aura de leurs premiers rôles. On n'en trouve aucun dans ce spin-off, mais c'est le réalisateur David Yates, sorti de la réalisation télévisuelle pour prendre HP en main à partir de L'Ordre du Phénix, qui va s'engluer dans la quintilogie que ce film augure.
Cinq films prévus, alors ? Bon courage, parce que ça commence mal. On est situé d'emblée dans un New York en pleine chasse aux sorcières. Et je ne parle pas de maccarthysme.
Évidemment, il est impossible d'aborder le film sans avoir l'esprit HP en tête. Et il est ambitieux, parce qu'il se donne le bagage de ses antécédents en prenant le pari de renouveller le genre. Pari perdu, l'ambiance britannico-brumo-mystérieuse ne sera pas retranscrite, les moyens sont trop neufs pour une histoire trop vieille. La luminosité de New York abrite un côté cartoonesque qui ne colle pas avec le ton éminemment britannique que J.K. Rowling vient instiller en s'attelant au script ; il y a conflit d'écriture.
L'appât est un mastodonte : qui ne rêve pas de voir le cinéma partir dans le délire d'un bestiaire inventif ? Mais ce fil rouge prometteur est souillé de plusieurs côtés. D'une, les effets spéciaux, irréprochables à la base, sont terriblement mal intégrés – on a du chemin à faire pour ça. De deux, on fige certaines scènes pour permettre au spectateur de se rincer l'œil devant la dernière trouvaille des artistes graphiques, comme si les animaux n'étaient pas respectables au-delà du rôle qu'ils jouent dans leur propre freakshow. Cela renforce l'étroitesse du scénario, trop rempli de micro-histoires (même si elles se déroulent toutes avec lisseté), et crée une ironie dérangeante, puisqu'une des grandes trames sous-jacentes de l'histoire est écologique : faut pas faire du mal aux animaux, blablabla. Non que ce soit un tort, mais c'est cliché et ennuyeux.
Outre des onces de prévisibilité (l'échange des valises, dont on voit tout de suite qu'elles se ressemblent) et la difformité des mots par rapport aux actes (les créatures se veulent mignonnes mais sont presque aussi ridicules que le personnage de Dan Fogler), l'œuvre radote la non-dangerosité des bêtes comme parangon d'un film engagé mais ça sonne juste faux.
N'exagérons rien : l'ambiance, quoique tiraillée entre l'américanisation de l'univers d'Harry et le charmant conservatisme de l'auteure, ne souffre guère. Et puis des trucs fonctionnent ; des éléments de l'histoire finissent par prendre et s'enflammer, parfois jusqu'à s'exalter. Par exemple, le dîner magique, dont les décors sont attrayants et l'action raffinée, est sûrement la grande réussite dans l'affaire. On notera aussi qu'Eddie Redmayne, malgré les contraintes étouffantes de son personnage et son élocution paresseuse, a donné du sien, et Katherine Waterston aussi à sa manière (je parle ici des deux personnages principaux).
Espérons quand même qu'on a raison d'attendre mieux des quatre suites prévues. Peut-être que Yates deviendra plus raisonnable sur l'utilisation du téléport.