Régis Wargnier, emplit de bonne volonté, signe un film biographique sous forme de devoir historique, compagnon dans les faits d’une certaine Déchirure. Nous revoilà pour l’occasion au Cambodge durant son époque maudite, celle de la révolution Khmers Rouges et son génocide. Adapté de la biographie de François Bizot, jeune français attaché alors à l’école française pour l’Extrême Orient, Le temps des aveux se veut un devoir de mémoire académique, un film très attaché au respect des faits, dans sa plus pure tradition. François Bizot, donc, fût capturé par les jeunes révolutionnaires car soupçonné d’espionnage puis, aux termes de quatre mois de détention, fût relâché pour transmettre aux Représentants de la République le programme social des Khmers Rouges. Il devra alors sa libération à son tortionnaire, le dénommé Douch, leader charismatique et idéaliste de la rébellion communiste. Bien des années plus tard, après avoir quitté le pays, y être revenu, François Bizot retrouve les Khmer rouge alors que celui-ci est accusé de crime contre l’humanité. L’histoire est captivante, certes, mais le film l’est-il aussi?
Très académique dans sa conception, le temps des aveux ne démontre dès lors que peu d’audace. Alors que les Khmers rouges et leur révolution sanguinaire ont choqués le monde entier de par l’accumulation des victimes laissées dans leur sillage, Régis Wargnier ne semble finalement que peu s’intéresser à l’horreur de cette guerre d’extermination. Se concentrant, à juste titre, sur le prisonnier puis exilé français, sa prise de position, sa souffrance, et accessoirement sur son bourreau mais finalement compagnon d’infortune, le cinéaste semble esquiver toutes les abominations, toutes scènes de violence. Le film, en lui-même, n’est jamais perturbant, semblant s’affranchir de tout ce qui pourrait réellement décrire la vraie nature des révolutionnaires, s’orientant un peu maladroitement vers les élans philosophiques et une amitié impossible en pleine débâcle humanitaire. Tout semble alors ouateux, nimbé dans un confort narratif excluant l’horreur et la crue réalité.
Ce postulat, du moins ce parti pris, ne permet jamais de s’attacher réellement aux protagonistes, finalement d’avantage des idéalistes que des victimes. Raphaël Personnaz, que l’on imagine avoir investi de sa personne sur un tournage exotique difficile, ne fait finalement qu’errer telle une bonne âme dans un monde en peine. Jamais charismatique, très conventionnel, son personnage, accessoirement mal vieilli en dernière partie du film, suit la ligne directrice du scénario sans prendre la peine de vraiment exploser. Quant à son tortionnaire, incarné lui par Kompheak Phoeug, acteur local pour le moins convaincant, il relève un peu le niveau des interprétations. Si son rôle n’est pas foncièrement bien écrit, l’acteur cambodgien semble pourtant capable de bien meilleur que sa simple figuration. Même Olivier Gourmet, personnage secondaire pourtant important, ne semble pas capable de relever le niveau.
Tout ça, finalement, pour dire que malgré les idées, les nobles intentions, le film pêche par manque de vitalité et l’on présume, de moyens. Si quelques séquences, notamment l’exil forcé de l’ambassade de France, sont réussies, bon nombre de scènes, elles s’avèrent fades et par-dessus tout artificielles, je pense là notamment à la détention du jeune français, soit la première partie du long-métrage. On peut, en conclusion, supposer que le réalisateur aura rempli son cahier des charges, respectueux qu’il fût de l’histoire de François Bizot. On peut aussi saluer les intentions de l’ensemble du casting ou encore la photographie, plutôt soignée. Mais l’on regrette finalement le manque d’amplitude d’un film qui ne peut que rivaliser avec le récent et moyen film britannique, les voies du destin. 09/20