Moi, ce que je me dis en ressortant de ce « Cold In July », c’est qu’on peut avoir les meilleurs ingrédients du monde, ainsi qu’une bonne maitrise technique de son outil, cela n’est clairement pas suffisant pour faire un film qui se tienne. Et c’est dommage car il partait très bien ce « Cold In July ». C’était nerveux ; ça nous mettait tout de suite dans l’intrigue et, surtout, le film semblait poser clairement l’ambigüité qui paraissait ronger le personnage principal : d’un côté son rejet de la violence et de l’insécurité et de l’autre côté sa prise de conscience sans cesse accrue d’une société bien plus dangereuse et violente qu’il n’avait pu l’imaginer… Enfin, si j’ai précisé « semble poser clairement » c’est parce que – patatra ! – en même pas dix minutes, le film se transforme en thriller tendu, mode vielle série B, où il s’agit d’échapper à un grand malade kidnappeur d’enfant. Et dix minutes plus tard, il se transforme à nouveau pour devenir un polar construit autour de la thématique de la théorie du complot. (…Et ça c’est juste avant de permuter finalement sur la thématique de la chasse à l’homme.) Ce film n’a absolument aucune cohérence ! Est-il du coup une parodie ? Un clin d’œil aux vieux films carpenteriens tels que le suggéreraient la musique très 80's ou bien encore certains personnages improbables comme peut l'être celui du ce personnage extravagant du détective privé ? Est-ce un simple exercice de style à prendre au premier degré ? Impossible à savoir tant Jim Mickle mélange les codes dans tous les sens sans jamais définir de véritable fil directeur auquel on pourrait se fier. Or à ce niveau là, , l’écriture pêche clairement en limpidité. Alors je sais bien que tout le monde n’accorde pas forcément autant d’importance que moi à la cohérence d’un récit et que beaucoup s’estiment peut-être heureux si, à la fin, ils ont vu de belles scènes avec une belle musique et de bons personnages… Seulement voilà, moi je suis le genre de gars qui, quand on lui raconte une histoire, écoute ce qu’on lui raconte et s’interroge sur ce qu’on lui dit, que ce soit parodique ou pas ; qu’on codifie du second degré ou pas... Moi, un film me prend quand il parvient à me poser face à une situation qui m’interpelle et que je me demande comment le personnage principal peut s’en sortir. Dans ce film, c’est juste impossible. Chaque nouvelle scène est un embranchement illogique de la précédente et, d’ailleurs, elle ne permet souvent pas de savoir en quoi elle est un tournant pour l’intrigue puisque, en fin de compte, il est impossible dans ce film de définir clairement l’objectif du personnage principal tant celui-ci change en permanence :
est-ce se sortir de cet univers de violence et d’insécurité comme c’est annoncé au début ? Est-ce retrouver l’identité de l’inconnu qu’il a tué ? Ou bien est-ce la compagnie virile de Sam Shepard ou de Don Johnson qui lui a fait brusquement oublier sa peur de la violence et du meurtre accidentel ? Ou bien est-ce simplement le fait de participer à un bataillon de justicier surarmé pour protéger la veuve et l’orphelin de vilains réalisateurs de snuff-movies comme c’est le cas à la fin ???
Le héros participe-t-il à une quête initiatique ? Recherche-t-il à purger le monde de sa vermine ? Recherche-t-il à se prouver quelque-chose ? A aider son prochain même s’il a cherché à buter son fils quelques-jours plus tôt ? Ce film est un grand patchwork de n’importe quoi dont on ne sait finalement pas quoi tirer. On associe dans un même film des intrigues qui n’ont rien à voir ensemble ; des personnages invraisemblables qui n’ont rien à faire dans le même film (non mais Don Johnson : quelle blague !) ; une musique qui n’a rien à voir avec l’atmosphère que cherche à se donner le film (s’il y en a une d’ailleurs). C’est le grand n’importe quoi et franchement, sur la fin, ça tire carrément sur le grotesque et le trivial. Alors je le répète, c’est dommage qu’avec autant d’éléments de qualité en termes de mise en scène, de musique et éventuellement d’acteurs on aboutisse à un résultat aussi déforme et stérile, mais pour le coup, ce « Cold In July » serait presque une très bonne leçon de cinéma pour faire comprendre l’importance d’une démarche ou d’un propos cohérent dans un film…