Enserrée dans le format restreint et étouffant de l'image, la photographie de Ivo Lopes Araújo est magnifique, et très justement récompensée au festival du film Mexicain de Guadalajara. Celle-ci favorise des flous dans lesquels les tons "pastels délavés" sont loin de faire penser aux éclatantes couleurs d'un Brésil que tout le monde connaît. Il en va de même pour la musique.
Pas ou de rares dialogues cantonnés à quelques phrases marmonnées à voix basse. D'autres, comme autant de bruitages, quand, par exemple, le principal protagoniste lave le sol de son triste appartement pour se croire ailleurs, et pris dans des rêves de grandeur, conduire un TGV.
Cet homme solitaire, étouffé dans un enfermement sur soi total, et qui semble irrémédiable, traîne sa silhouette dans des rues bondées ou enfermé dans une cabine de pilotage. Celle d'un train, son seul véritable "ami".
Une rencontre avec une femme, elle aussi emprisonnée dans un autre monde, celui d'internet et ses nombreuses connaissances virtuelles. Faute de vrais amis, elle proposera à cet homme solitaire, qu'elle connaît à peine grâce à leur milieu professionnel identique, d'être le témoin de son mariage. Un évènement qui semble hasardeux, avec un homme rencontré via un site de rencontres. Ce qui devrait être une fête arrachera un sourire à cet homme, ce témoin impromptu interprété par un acteur de théâtre reconnu au Brésil et qui tient ici son premier rôle au cinéma.
Paulo André. Une prestation incroyable de finesse et de précision dans chaque instant du film. Que ce soit un repas, quelques mouvements de gymnastique sur son balcon, ou sa démarche lasse et pourtant alerte entre les rails d'une voie de chemin de fer. Avec toujours ce même regard vide de toute émotion.
Un film très librement adapté d'une nouvelle d'Edgar Poe qu'il est difficile de commenter. Encore plus difficile de conseiller. En sortant de la salle j'étais heureux de respirer un grand coup, de marcher dans la rue et de rencontrer des connaissances. Une sacrée "expérience" comme le définissait l'une des collaboratrices du cinéma dans lequel je me trouvais.
Mais quel talent pour les deux réalisateurs de captiver notre attention pendant la durée de ce long-métrage qui reste plombant de bout en bout mais fascinant à la fois.