Bien sûr, c'est inattendu de la part de James Gray, l'homme des villes, de l'obscurité, du mal-être urbain. Bien sûr, cela a par moments un surprenant côté "Tintin dans la jungle amazonienne", quoiqu'il y ait pas mal d'incohérences scénaristiques (dans les détails, puisque les grandes lignes de la vie de Percy Fawcett sont bien là) qui auraient hérissé le pointilleux Hergé.
Mais quelle beauté dans les images! Le chef opérateur Darius Khondji, on dirait qu'il filme l'âme même des protagonistes.
Dès la première scène -une chasse à courre en Angleterre, sur le mode sportif....- on est secoués, et on comprend que l'on va avoir à faire avec un homme peu ordinaire. Le major Fawcett a déjà pas mal baroudé, dans des pays dangereux; il a acquis une expérience de géographe. Malgré cela, pas d'avancement, pas de médaille -sur lui plane l'ombre peu reluisante de son géniteur, buveur et joueur.... Lorsqu'on lui propose de reconnaître la frontière entre la Bolivie et le Brésil, qui se disputent des terres riches en hévéas, il ne voit qu'une occasion d'accomplir une mission dangereuse qui lui vaudra, enfin, la reconnaissance.... Et là, commence la fascination pour l'Amazonie, pour ces terres vierges, pour ces inextricables forêts primaires, pour ces habitants mystérieux si difficiles à rencontrer, le plus souvent hostiles (là on est en plein Tintin...) mais que Fawcett persiste à considérer comme de bons sauvages, et pour cette cité mythique qui serait, au fond de la jungle, le témoin d'une antique et puissante civilisation. C'est qu'on est dans les années 1910, au moment où Bingham découvre le Machu Picchu.... Quelques fragments de poterie suffisent à le convaincre de l'existence d'une cité qu'il baptise Z, et c'est l'histoire d'une idée fixe, d'une obsession -il y retournera encore et encore, même après avoir été gravement blessé à la guerre de 1914.
Et on comprend que c'est cette personnalité de Fawcett, magnifiquement interprété par Charlie Hunnam qui a pu fasciner James Gary. On retrouve son talent extraordinaire pour tirer, des acteurs, le meilleur d'eux même. Sienna Miller par exemple, qu'il rend intéressante; et surtout Robert Pattinson méconnaissable dans le rôle du compagnon de route du major, le visage couvert d'eczéma du aux piqûres d'insectes et mangé de barbe, qui accepte de n'être qu'un second couteau...
C'est à voir absolument, c'est du cinéma complet, qui allie l'intelligence, l'analyse, au grand spectacle. Magnifique!!