Quel bijou que ce "petit" film aussi discret que son personnage, aussi attentif que son personnage aux minuscules détails qui font la vie. Still life, je l'ai entendu comme "ça reste de la vie", même quand on s'est éteint. Ca reste de la vie, la forme d'une tête dans un oreiller ou la trace des doigts dans le pot de crème. Quelqu'un est passé par là, a souri au photographe, a mené son chemin du début à la fin. Amazing grace, un chant lithurgique grec, une chanson écossaise, chaque détail, et ce petit bonhomme qui conduit la barque, confiant en sa mission. J'ai remarqué qu'il n'y a rien de laid dans ce film. Même un fauteuil bancal qui tient grâce à une pile de livres peut être un clin d'oeil sur la transmission. Même les sous-vêtements qui sèchent sur le radiateur ou aux fenêtres ne font pas horreur, pas plus que le sujet, a priori rebutant. Rien n'est agressif non plus, c'est le patron avec son gentil sourire emprunté qui représente la pire violence... Mon seul bémol : la fin. J'ai râlé, j'ai même pensé : "ridicule". Et puis cette fin a amené la fin de la fin, les derniers instants, et là j'ai pleuré des rivières, en me disant mais oui mais c'est bien sûr, je comprends mieux le parti-pris. Mécaniquement donc, je rajoute un autre bémol : par pitié, les dirigeants de salle, ne rallumez pas la lumière trop tôt, c'est que les litres de larmes ont du mal à s'évacuer en dix secondes, laissez-nous au moins le générique entier dans le noir pour qu'on retrouve figure humaine. Et même, si on pouvait nous passer de la douce musique pendant une dizaine de minutes, puis des serviettes rafraichissantes et un petit thé, ça serait parfait. Rarement ça a été aussi dur de sortir de la salle qu'après ce film. Même "Franck" (avec Michael Fassbender) dont les dernières minutes sont totalement poignantes, n'a pas été aussi loin. Je me souviens du film de 6h, "Mes meilleures années" (je crois), un film italien vu en deux parties, dont j'ai eu du mal à me remettre, sanglotant au moins trois heures sur les six. Mais là, quand on est saisi aux toutes dernières minutes, c'est assez violent de retrouver la terre ferme comme si de rien n'était. Dernier détail : il y a du lacrymal douloureux. Là, non. On pleure de bonté, de douceur, d'empathie, pour citer mon adoré Apollinaire "à tout moment je voudrais sangloter, sur toi, sur celle que j'aime, sur tout ce qui t'a épouvanté".