L’inspiration du talentueux comédien, réalisateur et scénariste qu’est James Franco est donc sans limite. Ici, la petite fille Coppola, Gia de son petit nom, adapte un écrit de l’acteur, sorte de mémoires d’une jeunesse passée dans une banlieue cossue américaine. La jeunesse, en elle-même, s’offre une nouvelle autopsie avec Palo Alto, drame léger masqué en fable sociale sur l’enfer d’un petit monde privilégié. Difficile à cerner l’époque du propos, sans doute contemporaine. Difficile aussi de cerner les esprits retors des personnages, alternant flirts, fêtes et études. Cette jeunesse-là s’embête, se cherche et espère un lendemain radieux. Tous ont la clope au bec, tous sont tentés par les charmes du sexe opposé, tous ont dans l’esprit de surpasser ce petit monde pour devenir réellement quelqu’un.
La petite fille de Francis Ford Coppola à la réalisation, donc, est secondée par le fils de Val Kilmer et la nièce de Julia Roberts, à l’interprétation. Le produit possède tous les attributs de l’archétype même du film piston. Le constat n’est pourtant pas si sévère tant tout ce beau monde semble évoluer en toute indépendance dans une production sensuelle qui n’est pas sans rappeler les œuvres d’une autre descendante Coppola, la plus célèbre Sofia. La jeunesse qui s’invente des problèmes étant le centre du récit, difficile de passer à côté de Virgin Suicide, notamment. Bref, n’assimilons pas des films qui n’ont vraisemblablement rien à voir si ce n’est un nom de famille au générique, et pas des moindres.
Pour le coup, Gia Coppola démontre un savoir-faire tout naturel en termes de mise en scène. Bien secondée par l’auteur du projet, James Franco, la réalisatrice offre une vision intemporelle de cette vie en communauté, de cette jeunesse aisée mais pourtant malheureuse, dans un sens. La scène la plus marquante tient sans doute dans le séjour dans la chambre d’enfants de la jeune fille facile du bahut. L’innocence, malgré les apparences, est bel et bien perdue chez tout le monde, chacun évoluant de mal en pis, chacun s’efforçant de s’inventer des soucis, des complexes. Ceci n’est-il pas le fondement même d'une adolescence standard? Malgré l’approche sensible, on peine pourtant à s’approprier des émotions au vu de ses gamins hagards et amorphes, souvent complètement dépassés par si peu de choses.
La fragilité d’esprit de la jeunesse aisée américaine était-elle le centre du récit de Franco, du film de Gia Coppola? Peut-être son auteur visait-il plutôt à glorifier l’ignorance, la nonchalance de cette jeunesse qui prend le temps de vivre le moment sans réfléchir aux conséquences, qui s’amuse d’un rien et s’émeut de tout. En tous les cas, le film est réussi. Qu’il me plaise, ça c’est une toute autre histoire. Sensible, délicat, les aficionados du cinéma indépendant américain y trouveront leur compte. 10/20