Quand Insaisissables est sorti en 2013, on était loin d’imaginer qu’une suite verrait le jour. Le film de Louis Leterrier avait créé une secousse dans les salles qui restait une surprise dans la mesure où il était nouveau. Mais rien n’y fait : Hollywood aime les suites plutôt que les prises de risques. Ainsi Jon M. Chu s’est vu la charge d’Insaisissables 2 – dont la pauvreté du titre témoigne de celle de la démarche – en évitant pourtant pas mal de défauts typiques des suites. Une bonne histoire, un bon rythme et des personnages savoureux : tout est parfait pour se divertir.
Les Quatre Cavaliers n’ont pas changé, à une personne près : Isla Fisher partie, c’est Lizzy Caplan qui la remplace, et force est de dire qu’elle est insupportable, de bout en bout ; elle ne tient pas en place, elle est hystérique, ouvre souvent sa bouche pour ne pas dire grand-chose, et semble la cavalière la plus insignifiante du groupe, du vide profond de ses répliques à l’inutilité de son rôle dans l’histoire. Passons, c’est bien la seule qu’on a du mal à saquer, car le reste du casting est irréprochable. On retrouve la nervosité de Jesse Eisenberg avec plaisir, l’hypnose de Woody Harrelson assez surprenante, et le reste du groupe confronté à un ennemi…qu’on aime bien juste parce que c’est Daniel Radcliffe. Il leur demande de récupérer une puce informatique capable de finaliser son plan de surveillance des données personnelles. Ceux qui ont vu le premier pourront deviner que la vengeance n’est pas loin, mais aussi qu’il y a moins de tours de magie, quant aux autres, ça devrait rester un moment agréable éclairé par les projecteurs du mystère, voire du fantastique. Le film se targue d’ailleurs d’une dimension « spirituelle » en désignant la magie comme une sorte de distorsion de la réalité, où l’œil est à la fois le défaut et l’avantage. Même si les effets spéciaux expliquent certains tours improbables, on arrive à se faire prendre au jeu, et une fois dedans, l’illusion fonctionne à merveille. D’autant plus que le changement de réalisateur n’est absolument pas gênant : Jon M. Chu perpétue le travail dans la même veine que Louis Leterrier, en s’appropriant tout de même l’histoire, en la fourrant de rebondissements bien pensés et d’une dimension perchée entre la superficialité d’un spectacle paillette-argent et le réalisme d’une menace plus que d’actualité, le fléau de la data economy…
Combiné à une mise en scène rapide, efficace, l’ensemble est plutôt surprenant pour un second opus. A mi-chemin entre le thriller et le film d’action – la balance s’abaisse plus pour le second – on remarque l’habileté de la caméra qui nous permet d’apprécier certains numéros du quatuor ; même si cela penche plus vers l’exercice de style (la séquence où la carte passe de main en main et tournoie dans les airs) et se réduit à la seule perfection de sa réalisation, on note une petite tension, un émerveillement surtout de regarder, comme un gosse, un spectacle de magie où nos rêves se confrontent au possible, par le biais d’une subtile tromperie. Y a-t-il quelque chose (minime ou pas) qu’on peut reprocher à Insaisissables 2 ? Evidemment quelques incohérences ou contours sentimentaux mal dessinés, un manque de culot, d’ambition, tant il est difficile à Hollywood de sortir des sentiers battus, une omniprésence masculine à peine contrebalancée par un personnage féminin bâclé… Le public aussi a des cartes à jouer, en tant que spectateur. Mais à quoi bon en demander plus là où on ne demandait rien ? La métaphore du fou est bien amenée, par une carte de taraud, et symbolise quelqu’un d’insaisissable, qui change d’habit à volonté pour disparaître sans être tout à fait absent. Sur le coup, les Quatre Cavaliers ont tout raflé. Reste à savoir si on les laisse là ou si on les reverra. En 2020 peut-être ?