La vie de Lance Armstrong est évidemment un sujet de choix pour le cinéma. Il y a l'ascension brisée par la maladie, la guérison, le retour vers le sommet, la chute. Qu'Armstrong soit dopé, à la limite, je dis bien à la limite, n'est pas le problème entre guillemets. Car tout le peloton l'était comme dans les années 80. Ce qui choque, c'est toute cette stratégie mise en place par Armstrong et son directeur sportif pour duper les contrôles anti-dopage. Et je me dis que si, au lieu de s'échiner à se doper, il avait consacré ce temps à s'entraîner normalement, il aurait gagné le Tour de France sans tricher. C'est un peu ironique. On peut avoir du respect pour l'homme et sa fondation venant en aide aux malades du cancer. La seule fois où il semble sincère, c'est quand il en parle. Le sportif, lui, malgré un certain charisme, se sera comporté en Parrain du vélo. Menaçant de briser la carrière, à l'époque où il courait, de tous ceux qui oseraient émettre des doutes sur ses performances. Le pire, c'est que tout le monde savait : instances du cyclisme avec qui Armstrong était complice, peloton, journalistes. Ces derniers mettront très vite en doute (dès le Tour 1999) les capacités d'Armstrong à grimper aussi facilement. Avant sa maladie, on le voyait plutôt comme un coureur de classiques. Incapable d'accompagner les meilleurs en montagne et de tenir sur une course de trois semaines. Pour finir par ridiculiser ses concurrents entre 1999 et 2005 après avoir un vaincu une maladie aussi grave qu'un cancer des testicules. Avec le recul, je m'étonne, en effet, que cette supercherie n'ait pas été découverte plus tôt. Mais avec autant d'intérêts en jeu, comment pourrait-il en être autrement ? L'affaire Armstrong provoquera un tel ravage que désormais la suspicion est inévitable quand on regarde les accélérations de Froome en haute-montagne (lui aussi déclarait à ses débuts en 2008 que les montagnes, ce n'était pas pour lui) et la domination de l'équipe Sky. The Program permet en tout cas de revenir sur la période 1993-2005 correspondant un peu aux années sombres du Tour quand on voit la liste des coureurs impliqués dans des affaires de dopage : Riis, Virenque, Ullrich, Pantani, Armstrong et son équipe : Hamilton, Hincapie, Leipheimer. Frears nous montre de l'intérieur un homme ne concevant pas sa vie sportive et ses réussites sans le dopage comme un homme a besoin d'oxygène en comparaison. Un homme arrogant, menteur mais aussi fin tacticien et au mental d'acier. Entre ombre et lumière. Il m'a volé sept tours de France et une partie de mon adolescence mais j'ai du mal à lui en vouloir car, sur un vélo, il avait la classe et que ses empoignades avec Ullrich et Beloki me manquent.