"99 Homes" commence formidablement bien, et s'annonce comme une claque incroyable : description tendue et intense du programme d'éviction des mauvais payeurs de leurs maison suite à la crise des subprimes, il nous offre une poignée de scènes scotchantes, mémorables, avec l'excellentissime Michael Shannon en suppôt du Diable (les banques), ou c'est tout du moins ce que l'on pense d'abord. L'intelligence du film de Ramin Bahrani, c'est de ne pas en rester là, et de montrer à travers le parcours de l'une des victimes du "système", qui, pour survivre, passe de l'autre côté de la barrière, que rien n'est vraiment noir et blanc : le dilemme moral est clair, chacun est alors devant ses choix, profiter du système impitoyable pour pouvoir au moins survivre, voire même s'enrichir, ou faire partie des "99 personnes sur 100 qui n'arriveront pas à monter à bord de l'arche quand le déluge commencera" (la plus belle scène du film, avec un Shannon hallucinant). Malheureusement, il y a à mi-parcours un moment où le film s'affaiblit, où le spectateur décroche : la faute à la construction narrative, pas tout-à-fait assez prenante ? A une certaine timidité au final dans la remise en question des valeurs sacrées de la société américaine ? A l'absence d'une mise en scène notable (on est dans les poncifs habituels du cinéma US, avec une musique omniprésente qui tape sur les nerfs) ? Au manque de charisme d'Andrew Garfield, tout juste adéquat pour un rôle qui aurait mérité un acteur plus complexe ? Le film se termine un peu en demi-teinte, malgré la logique de sa conclusion, terriblement pessimiste. Vu l'importance du sujet, on aurait aimé que "99 Homes" soit une réussite totale.