Une magnifique œuvre d'un point de vue moral tant par le message délivré que par la poésie très forte qui ressort de la narration et la mise en scène, et même si le côté très barré du cinéma belge se fait ressentir de temps à autre qui peut bloquer un plus large public, on est surtout très ému tout du long et on se marre suffisamment pour apprécier le style mais encore faut il accrocher à ce qui est proposé. Quoiqu'il arrive on ne peut être que sous le charme de cette façon dont J. Van Dormael revisite les écrits chrétiens pour les adapter et les réutiliser dans notre monde actuel, avec des transpositions archi intelligentes, des allusions superbement trouvées, et des personnages bien marqués mais surtout impeccablement interprétés tous autant qu'ils sont, de B. Poelvoorde insupportable à souhait ce qu'il fait à merveille, à Y. Moreau toujours aussi bonne par sa simplicité et sa naïveté que l'on adore, en passant par cette pléiade de personnages et d'histoires secondaires tous très touchant dans la sincérité qu'ils mettent dans leur interprétation et bien que parfois ce qu'ils représentent est un peu bizarre, à l'image de l'histoire d'amour assez hors normes évoqué à travers le personnage de C. Deneuve qui risque d'en choquer plus d'un ou certains propos assez costauds mis dans la bouche d'enfants, on en est pas moins assez ému devant à plupart des tranches de vie présentées. On est bien loin du style très dépressif souvent harangué pour évoquer ce film car même si le parti pris est assez triste en majorité et que la manière dont est établie cette famille divine reste très noire, tout cela fait partie d'une harmonie générale et c'est de cette façon que la magie opère pleinement puisque même si l'on a la larme à l'œil quand on voit certain passage, il n'en reste pas moins que l'on se marre tout autant, que ça soit à travers l'humour belge pas toujours très accessible mais qui offre de sacrés moments loufoques ou dans les interprétations qui peuvent être faites qui deviennent hilarantes grâce à des situations surréalistes et surtout une vision très cynique de l'humanité, élément très présent dans les quelques films du réalisateur, sa façon très noire d'illustrer le monde des humains lui permet à la fois d'établir un espoir à sa manière mais aussi un style très engagé dans le message porté, pourtant il est clair que le but est dénoncer certains travers. Alors certes le paradoxe peut paraître étrange aux premiers instants entre humour corrosif et idées plus glauques que le film utilise allègrement tout azimut pour exprimer tout le sens de l'intrigue à l'exemple de cette scène hommage au célèbre George de son "8e Jour", qui est incroyablement déchirante mais tellement plein de sens et de magie, qui ne sera pas vu pareil suivant celui qui se retrouve face à cela , on ne sait jamais sur quel pied sentimental danser puisque l'on passe très facilement du rire aux larmes et l'aspect comique de ce film se retrouve essentiellement dans le cynisme établi ou dans des messages plus subtiles, mais dans le fond c'est ce qui fonctionne ici, donnant toute cette texture émotionnelle aux images établies et mettant en avant l'élément sûrement le plus essentiel de cette fresque biblique, soit la poésie qui enveloppe l'ensemble de la narration. La chose qu'il faut garder à l'esprit c'est que l'intrigue et son exploitation, en tout cas de la manière dont cela est fait par certaines répliques ou des passages, ne sont clairement pas à laisser à n'importe quel public car en plus de devoir apprécier ce genre d'œuvre au style assez singulier, les messages et idées défendues dans ce film sont pas simples à assimiler complètement déjà si l'on est pas touché au sens propre du terme mais surtout mais surtout si l'on est rebuté par des choses plus sensibles, car se sentir choqué n'a rien d'étonnant quand on voit ce qui est utilisé pour donner du sens au scénario, d'ailleurs ce dernier aussi peut poser des problèmes, en dehors du fait que certaines inégalités se font ressentir tout au long du film, que cela concerne les histoires des personnages secondaires qui trouvent pas toutes la même résonance ou tout simplement dans le rythme qui a tendance à montrer des baisses de régime au fur et à mesure, en tout cas s'agissant de l'humour et l'originalité, il faut quand même être préparé au genre d'univers qui s'apprête à être dépeint à l'écran. En effet l'histoire en elle même est plus qu'alléchante avec une vision unique du royaume de Dieu qui prend tout son sens non seulement de nos jours avec le rôle inattendu de l'informatique et des télécommunications par exemple lié au divin, ou tout simplement l'emplacement géographique, et dont le but est clairement de donner une once de réalité sur un sujet tel que la croyance religieuse, du moins en le transposant avec des éléments plus terre à terre, offrant un résultat très réussi et même si tout n'est pas gai on prend beaucoup de plaisir à suivre cette aventure un peu barrée certes mais tellement bien amené et surtout incarnée par des protagonistes et des histoires très touchant et qui laisse largement de quoi réfléchir, que cela soit sur notre condition mais aussi de manière très intelligente sur la religion chrétienne, qui pour le coup ne risque de ne pas vraiment plaire aux croyants, non seulement par la dénonciation loufoque parfois trash qui en est faites mais surtout par la réadaptation totalement décalée avec des personnages très particulier, avec à son apothéose celui de Dieu qui est montré d'une toute autre façon que le célèbre adage "Dieu est amour", et c'est clairement tout ces éléments qui pastichent de manière assez lugubre cet univers très sacré car on adore le détournement qui en est fait à travers un tas de petits détails scènaristiques qui font leur effet, à l'image des éléments mis en place par le Créateur pour "emmerder" l'Humanité qui sont tout simplement truculents. Une vraie œuvre à part qui s'empare de toute la palette des sentiments, qui sait toucher autant que rebuter mais toujours de manière très réfléchie, on l'on prend vite conscience que le but est de proposer un moment qui laisse à penser et donnant une grande place à l'introspection ainsi que l'œil critique vers notre société et peut être plus particulière à sa relation au temps, et transmettre ce genre de message de la façon dont J. Van Dormael reste assez captivant même si l'on accroche pas à tout, et le plus appréciable c'est qu'à ce niveau la, chacun aura sa sensibilité, l'un trouvera tel élément barbare voir immoral alors que d'autre y verront une idée magnifique, et malgré un rythme qui se fane doucement et fait que l'on accroche un peu moins à la fin, le déroulement lui de l'histoire reste de bonne qualité tant esthétique que dans la narration, surprenant et déroutement en somme, mais tellement tordant!