Le Tout Nouveau Testament (2015
Dieu existe. Il habite à Bruxelles avec sa fille.
Mais ce n’est pas tout, Dieu est également acariâtre, désagréable et hargneux.
Partant de ce constat, on peut immédiatement comprendre qu’il ait des problèmes avec sa femme et sa fille, et que cette dernière ait un conflit d’autorité envers ce père stricte et vieux jeu.
La jeune Ea n’a plus donc l’envie de rester au domicile et décide de s’enfuir, partant rechercher six nouveaux apôtres.
Avec un rythme constant, la narration est bien équilibrée, l’histoire étant composée de petits chapitres, chacun étant lui-même organisé autour d’un rebondissement interne propre. J’ai suivi sans ennui l’histoire, découvrant à chaque fois une nouvelle facette, une nouvelle interprétation du sens de la vie, bien que
l’objectif d’Ea se perde légèrement vers la fin du film et passant au second plan par rapport à une trame secondaire lié à un des apôtres.
Certaines thématiques à la limite de la controverse peuvent pousser au débat, mais elles sont abordées parfois sur le ton naïf, au travers des dialogues des enfants, parfois sur un ton ridicule, créant ainsi des situations amusantes. Cet humour (p.ex. une variante de la Loi de Murphy), construit sur ces situations parfois absurdes, parfois sur les comportements singuliers des personnages, ou le clash entre Dieu et les humains, sont plaisant et restent léger. Jaco van Dormael nous a habitué à ses réflexions existentialiste et à sa vision mettant en question les actions et les vies de ses personnages. Il applique ici la même formule et le décalage au service de l’humour fonctionne.
Les thématiques explorent des facettes (honteuses ?) de l’humanité, et le fait avec un sarcasme léger, cherchant plus à présenter ces sujets via des métaphores. On sent l’idée et la réflexion sur les idées de base, recherchant le côté et la morale humaine dans les préceptes et dans la représentation du pouvoir paternelle. Mais toutes les métaphores sont, cette fois-ci, étrangement principalement axées sur le premier degré d’interprétation.
Les acteurs sont globalement bons. Benoit Poelvoorde joue … lui-même, et cela concorde extrêmement bien avec son personnage. Il donne beaucoup d’énergie et un côté dérèglé à sa version du dieu chrétien, lui accordant un déséquilibre à la limite de la névrose dans ses actions, mais également un sentiment de déception et de désillusion face à sa création.
Pili Groyne donne du caractère à Ea, lui conférant un calme et une vision du monde en décalage avec la vie des mortelles. François Damiens m’a surpris par son interprétation étudié et par moment subtile, tout comme Serge Larivière.
Par contre, Catherine Deneuve m’a déçue, son jeu me semblait artificiel et manquait d’honnêteté, tandis que Yolande Moreau n’avait pas beaucoup de latitude, interprétant un personnage avec peu de dimension.
Chacun des apôtres, reflétant un type de personnalité épuré et stylisé, permet d’étendre des interrogations et d’interpeler le spectateur sur des aspects précis. Mais ils se retrouvent malheureusement par là même, simplifiés à un ou deux traits de caractère et leurs développements sont inégaux. Certains d’entre eux s’intègrent complètement à la quête d’Ea, tandis que d’autre ne font de traverser rapidement l’histoire, et j’ai trouvé par exemple dommage que
les personnages de La femme de Dieu et du voyageur Jean-Claude n’aient pas été plus approfondis.
L’image est propre est agréable à regarder, utilisant des constructions symétriques et posées, tandis que la présence d’effet numérique est perceptible mais ne gêne pas, participant tout autant que les miniatures à conférer à l’œuvre un aspect de conte.
La musique a été choisies dans le but d’illustrer
et de participer à l’identité de chacun des personnages, à la façon d’un thème, mettant en couleur leur personnalité et leur passion.
Cela fonctionne bien. À mon goût le réalisateur aurait pu ne pas simplement se contenter de musique relativement populaire, mais aurait pu augmenter sa recherche en cherchant des musiques plus variées, en creusant d’avantage cette idée
d’analogie
et en l’approfondissant.
Je pense que cette remarque (creuser les thématiques) peut s’applique à l’ensemble du film.
J’ai passé un agréable moment à regarder ce film à l’humour léger.
7/10