Si je n'étais pas sérieux, ce qui est le cas, je dirais que ce film s'inspire de la série des Fantomas des années 60 qui contribuèrent à la notoriété de Louis de Funès de Gallarza. Le héros, mégalo et bleuté, revêtait l'apparence de ses futures éventuelles victimes pour les faire généralement chanter en l'échange de rivières de diamants, à l'aide de masques plus ou moins grossiers. Jean Marais s'est certainement marré, ses maquilleurs eux riaient jaune.
Si je redevenais sérieux, ce qui n'est pas souvent le cas, je dirais que le film de Matthieu Delaporte est un film intelligent et gouverné de main de maître par Mathieu Kassovitz. Ce dernier, Sébastien Nicolas au générique, même une vie d'une lente banalité. Agent immobilier, son costard gris clair semble sa seconde peau. Pas d'amis, hormis un écclésiastique plein de compassion pour son skin-costard, une vie sentimentale lacunaire, Sébastien a pour essentiel passe-temps le fait de se grimer pour ressembler à des quidams qu'il observe avec un soin maniaque. Patrick Sébastien aurait beaucoup à apprendre sur le sujet tant la précision du résultat obtenu est confondante. Les proches des gens qu'il "remplace" n'y voient que du feu, mais à trop jouer les copies, Sébastien s'emmêle un peu les pinceaux et se retrouve un peu coincé, comme ce qu'il est dans le civil. Kassovitz est, une fois encore, bluffant dans ce rôle où il cherche à tout prix à tromper la solitude et l'ennui, voulant maîtriser les choses sans pour autant nuire à personne. La musique quant à elle, de Jérôme Rebotier, colle à merveille aux émotions et aux mutations du héros.
Rendre un thriller original n'est pas chose aisé, il fallait une distribution efficace, avec une mention galante pour Marie-Josée Croze, et un scénario aussi désirable au réveil, sans maquillage, qu'en milieu d'après-midi dans l'obscurité d'une salle de cinéma.