Love And Mercy, le, film sur le co-fondateur des Beach Boys, Brian Wilson, est une œuvre qui ne laisse personne indiffèrent. Plongé dans deux époques différentes du génie créatif, elle dévoile son triomphe puis une part de sa décadence. Les abimes les plus profonds de sa vie ne sont pas explorés, sans doute pour laisser au spectateur la plus belle image de sa vie : Celle où il s’est battu, a fourni Pet sound, Good Vibration, une ébauche de SMiLE puis ces autres sons qu'on connaît moins.
Avec du recul, on ne peut que considérer ce parti pris avec beaucoup d’égards. La réalisation est soignée, parce qu’elle rend hommage à cet homme hors du commun, qui pourtant a eu une vie bien en dessous de ce qu’elle aurait dû être. La gloire n’aura pas durée longtemps, le toit du monde se sera rapidement dérobé pour laisser place à la folie de l’après SMiLE, et à la dépression infernale. Mais qu’importe, il a livré au monde certainement l’une de ses plus belles facettes musicales. On ne pouvait pas lui en demander plus.
Avec Brio, le film nous plonge dans des petits moments, tous liés à son œuvre. Les scènes studios sont jouissives, on en garderait presque le souvenir le plus impérissable qui soit, d’un point de vu cinématographique. La façon dont sont filmées les scènes est aussi très bien exploitée, car jamais ce n’est trop intrusif. Nous sommes, pour la première fois de notre vie, des spectateurs.
Dans la scène d’introduction, quand Brian assis au piano cherche dans sa tête le son qu’il a entendu, ou lors des sessions pour Good Vibration, le moment où il est profondément touché par ce qu’il entend. Avec toute la colère que cela provoque souvent en nous, nous voyons les injustices que subit le personnage. Nous voyons son père rabaisser son travail sur God Only Knows, la plus belle chanson d’amour d’après Mc Cartney.
Nous voyons le groupe indifférent ou approbatif, puis nous assistons à la décadence et à l’utilisation de sa créativité, pour de l’argent. Toujours plus, car on aime l’argent. La formula, c’est ce qu’il faut, dira Mike. Nous le voyons seul avec lui même, incompris, tentant de rivaliser avec des Beatles trop unis pour se laisser submerger. Puis nous sommes gênés, nous pleurons presque avec lui, sombrons de chagrins à l’idée d’une vie si lamentable. En un mot ? Ce film est un hommage magnifique. Ça en fait deux oui, mais je ne sais pas quoi dire. Fan du groupe, oui, fan admiratif de Brian, jusqu'à la mort ; cela va sans dire que j'aime ce film. Car, jamais il ne tombe dans les travers d’une glorification de l’homme et d’une surabondance de scènes montrant la connerie des autres membres de son entourage. Tout y est juste. L’histoire du groupe est fidèlement retranscrite, et nous pouvons meme nous plaire à imaginer des thématiques liées à l’horrible milieux musical et commercial, écrasant les Artistes, avec un grand A.
Si on pourra regretter l’impasse sur la période 1968-1978, car elle est très riche, on ne peut que féliciter le réalisateur d’avoir développé à fond celle qu’il a choisi, la plus représentative de Brian après tout. Peut-être une série pourrait combler ce manque, en tout cas ce serait avec plaisir que je courais à elle (Pour un gros comme moi, ça représente beaucoup d’efforts pour bien moins qu’un sandwich. Ou plus ?)
Vous l’aurez compris, si je met 5 étoiles à ce film, c’est pour sa grande sincérité. Il est à mon sens, à des années lumière des biopics tous plus édulcorés les uns que les autres. J’abuse ? Je ne le nie pas, parce que, il faut le comprendre ainsi : Vous serez transportés par Love And Mercy. Je l’ai été en tout cas, et j’en suis heureux. Démonstration de cinéma, et hommage vibrant, définition du biopic, et casting scintillant, ce film ne souffre d’aucune fausse note. Un chef d’œuvre ? Oui. Après « An American Family », tout le peut, si ce n’est seulement lui.