Devenu le symbole de la comédie française bas de plafond (exception faite du surprenant "Incognito"), Eric Lavaine a visiblement décidé de mûrir en abordant des sujets différents des habituels dérapages gays (à faire rougir Gabriel Aghion) et autres flatulences dont sa filmographie est abreuvée. Avec "Barbecue" (titre qui permet un hallucinant placement de produit en début de film !), il traite de l’amitié et de la crise de la cinquantaine… et réunit, au passage, un casting quatre étoiles. Ce "film de la maturité" parvient, ainsi, à s’affranchir de la lourdeur des précédentes comédies du réalisateur mais souffre, malheureusement, de très nombreux défauts, qui sont loin de se limiter à la seule platitude de sa mise en scène. Tout d’abord, le scénario s’inspire ouvertement de succès récents comme "Le Coeur des hommes" ou "Les petits mouchoirs" et a beaucoup de mal à digérer ses références. On a, ainsi, souvent l’impression de se trouver devant la pâle copie d’une histoire déjà vue, que ce soit par la maison avec piscine où la bande se réunit pour les vacances ou encore par
les règlements de compte entre amis sur fond de leçon de morale, que n’aurait pas renier ce brave Joël Dupuch entre deux écaillages d’huîtres
. Il faut dire que "Barbecue" se risque pas trop à faire dans l’original puisqu’il ressasse l’éternel constat cinématographique qui veut que, passé 40 ans,
on s’emmerde dans son boulot, on se fait chier avec ses potes et on trompe sa femme
! Avec un scénario aussi prévisible, on aurait pu espérer avoir droit à une petite prise de distance avec le sujet ou à une galerie de potes haut en couleur qui viendrait un peu surprendre le spectateur. Malheureusement, Lavaine passe trop souvent à coté du potentiel formidable de ses personnages, ce qui est clairement due à une invraisemblable paresse sur le plan de l’écriture. Résultat, il laisse les acteurs se débrouiller avec des rôles peu écrits… et les empêchent, ainsi, de s’éloigner de leur emploi habituel. Ainsi, Lambert Wilson est évidemment flegmatique mais son personnage devient rapidement pénible, Guillaume de Tonquédec s’en sort un peu mieux avec son obsession de la gagne mais ne change pas vraiment de registre, Florence Foresti nous ressort son numéro habituel d’hystérique rigolote, Lionel Abelanski est toujours aussi peu charismatique, Jérôme Commandeur s’empare du personnage le plus drôle mais est un peu trop limité au rôle du simplet de service. On regrette, également, que Franck Dubosc, qui campe un divorcé malheureux et aigri (soit un rôle différent du séducteur pathétique dont il a fait son fonds de commerce) soit si peu exploité, avec un nombre de scènes bien insuffisants. On peut, d’ailleurs, se demander pourquoi Lavaine a fait le choix de se concentrer autant sur le personnage de Lambert Wilson au détriment des autres membres de la bande. Ce choix empêche le film d’être une véritable comédie chorale, sentiment que l’utilisation (chiante) de la voix-off de son personnage vient renforcer. Ceci étant dit, je suis sûrement un peu trop dur avec ce "Barbecue" qui se regarde, malgré tout assez gentiment et qui réserve même quelques bons moments
(Antoine qui évoque un risque de maladie vénérienne pour rompre avec ses maîtresses, la sangria au Château Petrus, le divorcé Baptiste qui se fait passer pour veuf pour draguer…)
. Et puis, on appréciera un certain goût de cette bande d’amis pour l’épicurisme (la bouffe, les vacances, les apéros, les sorties…) même s’il n’est pas forcément à la portée de toutes les bourses, ainsi qu’une jolie représentation de Lyon, qui n’est décidément pas assez portée sur grand écran. Malgré tout, au vu du casting réuni, on ne peut pas se satisfaire d’un film à l’intrigue aussi mince et aux dialogues aussi pauvres.