Un film qui a de la classe
Pour commencer, je vous souhaite une Bonne Année et vous présente pour 2015 mes meilleurs vœux de réussite et surtout je souhaite que 2015 soit une grande année de cinéma. A ce propos, quoi de mieux pour commencer l’année que le 3 ème film du brillant J.C.Chandor. Ce dernier est un des 4 cinéastes, qui selon moi, va régner sur Hollywood dans les 10 prochaines années (ceux que je cite à la fin de mon article sur Whiplash). Ancien réalisateur de clips publicitaires, il décide en 2011 de changer radicalement de voie en réalisant son premier long métrage « Margin Call » un drame dans les coulisses de la bourse new-yorkaise « pré 2008 », qui fut un véritable coup de maître (tellement qu’Oliver Stone a surement dû manger la bobine de « Wall Street 2 »). Après un second film, « All Is lost » qui a divisé beaucoup de monde, a-t-il réussi un nouveau de coup maitre avec « A Most Violent Year »? Décryptage.
Histoire: New York - 1981. L'année la plus violente qu'ait connue la ville. Le film retrace pendant une courte période, l’histoire d’Abel Morales, un ancien émigré qui possède une entreprise de distribution de fioul, qui fonctionne très bien. Symbole du rêve américain, il a pour ambition d’acheter un nouvel entrepôt pour pouvoir agrandir son entreprise. Mais Abel va rencontrer de multiples difficultés notamment ses chauffeurs qui se font voler leur cargaison, ainsi que le nouveau procureur qui l’a dans le collimateur. Cet homme qui se dit être un honnête businessman va devoir se sortir de cette spirale infernale avant de tout perdre mais à quel prix.
En lisant ce synopsis et en regardant la bande d’annonce, on a l’impression que « A Most Violent Year» est un mélange entre polar et film de gangsters, mais en réalité, il s’agit plus d’un mélange entre drame et thriller psychologique. À l’instar d’un Sidney Lunet, Chandor montre plus une violence psychologique qu’une violence physique (un peu comme une prise d’otage); après bien sûr, il y a une part de violence physique dans le film mais elle est moindre comparée au dommage matériel (argent, enquête judiciaire, etc.; après je ne vais pas tout spoiler) que subit Abel ainsi que sa société.
Ce qui intéresse le réalisateur c’est de montrer la violence du monde des affaires et surtout comment peut-on survivre dans ce monde et écraser ses concurrents tout en restant honnête? C’est cela l’enjeu majeur du film et Chandor le traite quasiment de la même façon que Margin Call, donc attendez-vous plus a voir des réunions entre différents concurrents que des vendettas armes au poing.
Pourtant, l’ensemble n’en reste pas moins passionnant, car le cinéaste arrive à nous immerger dans cet univers avec une certaine classe. Déjà, la mise en scène est vraiment excellente, une ambiance immersive et extrêmement bien travaillée, notamment grâce a une photographie clair-obscur sublime.
Ensuite, les acteurs sont parfaits, notamment le duo Isaac-Chastain qui forme un couple shakespearien sublime (notamment l’affiliation du personnage d’Anna à lady McBeth me semble évidente).
Ensuite, le scénario est extrêmement bien construit car en plus de confirmer ses talents indéniables de scénariste, Chandor commence à devenir un dialoguiste hors pair, certains de ses dialogues ont une musicalité vraiment intéressante (je pense notamment à la scène de la perquisition).
Enfin, j’ai adoré l’approche du film qui d’une part me fait penser un peu à ce qu’avait Martin Scorcèse avec «Les affranchis», c’est-à-dire montrer la dimension à la fois hypocrite et à la fois respectueuse de cet univers, de cet esprit:«je t’aime bien mais c’est le business», et d’autre part de montrer une vision un peu brutale et pervertie du rêve américain .
Après le film n’est pas totalement parfait, la faute à l’avant dernière scène que je trouve personnellement très théâtrale et je pense que le réalisateur aurait pu arriver à faire passer la même idée tout en étant un peu plus fin.
Malgré cela, « A Most Violent Year » reste un excellent film qui vaut réellement le détour et qui confirme que J.C. Chandor a le potentiel pour devenir l’un des meilleurs cinéastes américains de ces 20 ou 30 prochaines années.