«Margin Call» avait démontré le talent de J.C. Chandor, confirmé deux ans plus tard avec «All is lost», conjugué à la participation de Robert Redford, encore en très grande forme.
Le metteur en scène est de retour, avec un budget plus conséquent et de grandes ambitions. La distribution, elle, brille une fois de plus, puisque Oscar Isaac et Jessica Chastain sont de l’aventure.
Au départ, un récit simple mais toujours en lien avec une crise, ici la violence, après celle de la finance de «Margin Call» et métaphorique du capitalisme grandissant dans «All is lost». Le scénario donc, centré sur le début des années 80 à New York, années de violence marquées, s’ingénue à dépeindre les contours de la réussite et du rêve américain. Si sur le sujet beaucoup de longs métrages ont déjà vu le jour, dans son traitement et dans le discours, J.C. Chandor fait peau neuve, avec talent. On sent bien évidemment, dans la continuité de sa filmographie, cette envie d’aller vers un classicisme cinématographique, proche d’un Sydney Lumet, ici du moins, ou plus récemment, celui de James Gray, qui bien qu’ayant sa propre grammaire, s’en rapproche par instants (façon de filmer New York, mise en relief importante du caractère prononcé de ses personnages, et de leurs interactions…).
Nous sommes proches des accents shakespeariens, sans jamais vraiment y perdre pieds, fautes d’enjeux majeurs dans l’évolution du couple interprétés par Jessica Chastain et Oscar Isaac. Le récit et la mise en scène du film se recentrent plus sur les chemins possibles, bons ou mauvais, pour accéder à la réussite. A ce titre, l’ambivalence et les multiplicités des choix qui s’offrent aux personnages principaux réveil l’enjeu de «A most violent year». Comment naviguer entre moralité et accessibilité à ses plus grands rêves. C’est sur ce point, en prenant son temps, que le réalisateur apporte une conclusion intéressante, sans pour autant en avoir mis de côté les risques encourus.
Scénario efficace, mise en scène encore une fois raffinée, voire théâtrale, dans sa structure. Ajoutons à cela une photo laiteuse de Bradford Young et le tout est réellement captivant.
En parlant dans un même élan des dilemmes moraux et de la vie d’un couple au cœur des années 80, et en conjuguant l’ensemble avec un regard informé et critique de la naissance du capitalisme, J.C. Chandor livre un film très honnête dont le néoclassicisme rappelle les meilleurs films de certains réalisateurs (Lumet, Pollack…) auxquels il semble rendre hommage. On peut également évoquer une interprétation brillante qui ne dénote pas, bien au contraire, dans l’ensemble picturale et de fond que tente humblement de filmer J.C. Chandor. Une belle note de «vrai» cinéma, presque à l’ancienne.