Une comédie n’est pas un film comique mais rien ne nous empêche de rire dans une comédie. « Libre et assoupi » est une comédie où j’ai souri de bon coeur avec ça et là, des éclats d’étonnement. Ce film est une bonne surprise, et tout comme « Les combattants », le cinéma Français sait de temps à autre se renouveler en terme de comédie (9 mois ferme en est la preuve aussi). « Libre et assoupi » est un hommage à la paresse assumée, un « Alexandre le Bienheureux » des années 2010. Ce qui pouvait passer dans les années 60, l’est certainement moins aujourd’hui. Il y a peu, nous avions un président arrogant qui vantait les mérites de la France qui se lève tôt. A cela s’ajoute une pensée unique : pour réussir, il faut travailler. Et à cela s’additionne des chômeurs qui luttent pour trouver un travail. Sébastien, le plaisant Baptiste Lecaplain, se bat pour ne pas travailler. Il revendique le droit à ne rien faire, à paresser. Il assume totalement et sans aucun scrupule le droit d’être un assisté. Voilà un film politiquement incorrect. Selon Sébastien, le travail n’est pas une qualité, au contraire, c’est une torture. Combien il a raison, surtout pour ceux qui vont travailler avec un boulet à la cheville, la peur au ventre, le moral à zéro. Tous n’ont pas la chance de faire un métier qu’ils aiment. Alors pourquoi se tuer à la tâche, gâcher ses journées à maudire son existence et quand vient le bilan, constater que la vie menée par un travail « forcé » n’a été à aucun moment source d’épanouissement ?! Voilà un thème fort, conduit par un Sébastien qui a mille fois raison de dire (de mémoire): « on est défini par ce qu’on fait (le travail, son rang social) et non par ce qu’on est (l’individu dans sa plus simple expression) ! En effet, l’individu n’existe pas s’il ne travaille pas. C’est malheureusement une évidence. La société est ainsi faite, c’est inscrit depuis notre enfance, rabâché par nos parents, martelé par nos professeurs et menacé par les institutions ! L’individu ne peut exister que s’il participe activement au tissu social, s’il participe activement à la richesse de son pays. Ce qui est louable. Les invités d'Anna disent de Sébastien : un assisté, un parasite de la société etc… Le discours était inévitable, ce n’est pas un cliché. Le film distille avec parcimonie quelques vérités (?) sur la démarche assez étonnante, voire déplaisante de Sébastien. Mais le réalisateur préfère par endroits choisir aussi la comédie décalée comme le speech de présentation de Richard, remarquable Denis Podalydès, en conseiller social, lequel se rend complice de Sébastien en acceptant de le couvrir ; comme cette amende délivrée à Sébastien parce qu’il lit en mangeant des Pépitos tous les jours dans le même parc ; sa présence quotidienne dérange ceux qui vont travailler ! Charlotte Le Bon, Félix Moati complètent une interprétation solide et agréable. Je peux regretter deux points : le fait d’avoir bardé de diplômes Sébastien. Il semblerait qu’il était indispensable d’en faire un intellectuel pour valider sa démarche. Si Sébastien était un simple bachelier, cela aurait été trop évident qu’il choisisse ce mode de vie ?! Et le fait qu’il finisse par se ranger. Il travaille, il trouve une femme et a un enfant. Certes, il revient sur sa première démarche en optant pour le statut de père au foyer, un moyen de ne pas aller au travail ; mais là encore, cela aurait été plus fort si sa compagne avait accepté sa philosophie. Le film ne peut s’empêcher d’être un brin moralisateur… C'est le lot de beaucoup de films. Dommage. Il faut avoir le courage d'aller jusqu'au bout de son propos. C'est une comédie et peu importe le réalisme ou sa part de réalité. A voir.