Quatrième round pour le prodige texan, Jeff Nichols. Quatrième long-métrage qui revisite, pour l’occasion, les classiques de science-fiction de jadis, on pense au Rencontres du troisième type de Steven Spielberg, tout en durcissant le lien qui unit un père désespéré à son enfant. Sans préambule, sans intention d’éclairer un tant soit peu la lanterne d’un public immédiatement confronté à l’absurdité, à la fuite en avant d’un trio pour le moins mystérieux, le réalisateur nous confronte à l’extraordinaire de manière frontale, faisant de nous des voyeurs assistant à quelque chose qui nous dépasse allègrement. Un jeune garçon, Aldon, semble doué d’une multitude de pouvoirs incompréhensibles, et voilà que la secte de laquelle il s’est échappé avec son père, assisté d’un ami d’enfance, policier de son état, et le gouvernement fédéral tentent, par tous les moyens de lui remettre la main dessus. Le père, son acolyte, bientôt la mère du petit, lutte pour ne pas céder à leurs poursuivants, le tout pour mener le fils prodigue vers un lieu de rencontre mystérieux.
Voilà la pitch, sur le papier, simpliste de Midnight Special, brulot de science-fiction, paranormal, qui étale avant tout les rapports humains qui unissent une famille seule face au monde entier. Michael Shannon, muse du cinéaste, qu’il retrouve pour la quatrième fois, incarne ce père obstiné, curieux phénomène qui ne vit que pour l’aboutissement des visions de son fils, assisté dans sa tâche par un excellent Joel Edgerton, tout en sobriété. La présence de Kirsten Dunst, quant à elle, s’avère plus anecdotique tant le rôle de la mère est esquivé par la passion du père pour le bien du petit. L’obstination, la protection de sa descendance à tous prix, dans un cadre SF strictement conventionnel, une manière de revisiter le genre en poussant l’humanisme en avant. Idée lumineuse, s’il en est, mais qui ne suffit pourtant pas à faire de Midnight Special un grand film.
Oui, en rapport à ces deux précédentes pépites, Take Shelter et Mud, ce nouvel exercice du texan semble un cran en dessous tant il manque parfois de tonus lorsqu’il s’agit de faire s’illuminer le principe même du film de science-fiction. Impeccable dans les rapports humains étalés face à nous, le film manque d’une certaine part d’originalité, sans compter que les moyens financiers alloués à la production n’ont semble-t-il pas suffit à Nichols pour réalisés des effets numériques à la hauteur de la normalité d’aujourd’hui. Nuancé, donc, que cet essai, légère déception pour ma part.
On retiendra la toute belle prestation du petit acteur qui interprète Aldon, les remarquables présences de deux acteurs principaux et le respect de Nichols pour ses aïeux en matière de SF traditionnelle. Manque ici un petit plus qui aurait sans doute fait de Midnight Special une nouvelle totale réussite pour l’un des artisans qui incarne le réel futur du cinéma indépendant américain. 13/20