Une comédie ? Je sous-titrerais bien ce film "Les petites humiliations font les grands cauchemars"... Or, le cauchemar, on vient de le vivre en vrai à Paris en ce début janvier 2015... Je n'étais donc pas très à l'aise dans ma salle de cinéma. Rien d'hilarant ici, pour moi. Du jouissif ? Oui, parfois. Jouissif, le mariage déconstruit dans le sketch final. Ou le gâteau d'anniversaire offert à Ricardo Darin. Ou le père qui ne veut plus distribuer ses millions. Mais surtout, du malaise. La lutte entre les deux automobilistes sur la route déserte est presque un écho de ce qui s'est passé en ce 7 janvier. On part de si peu (c'était en 2006, des dessins avaient été publiés au Danemark - et justement, j'étais en Argentine à ce moment précis), on se fait un doigt d'honneur, on se tire la langue... et c'est parti pour le grand massacre. Ah tiens, la nature humaine. Si je mets la note de 4 à ce film, c'est que le malaise qu'il m'a provoqué vient d'une belle justesse à montrer comment un monde peut s'effondrer en un claquement de doigt. Le premier sketch est bien ficelé, j'adore sa chute dans un timing parfait. Mais que nous dit-il ? Qu'on devient fou à force d'être humilié ? Ou bien que certains sont plus fragiles que d'autres face aux tourments de la vie qu'on subit tous ? Le second sketch, dans le restaurant perdu, m'a fait me poser bien des questions : que peut-on dire à quelqu'un qui avait le pouvoir et vous a écrasé ? Rien, sans doute, il vous rira au nez et se moquera éperdument du mal qu'il a pu vous faire. Alors quoi ? Subir, se taire, ou écraser à son tour, quand par le plus grand des hasards on a le pouvoir de le faire - mais qu'on n'y est pas préparé ? La résolution de cette histoire est ambigüe. D'autant plus intéressante. Le troisième sketch, les deux automobilistes, est une grande gifle. Tout y est gratuit. On ne sait pas pourquoi le sale gosse a décidé d'emmerder l'autre. On ne sait pas pourquoi certains décident d'aller jusqu'au bout dans la violence. Mais ils y vont. On vient d'en avoir la preuve. Le sketch du fils coupable d'un accident mortel est raffiné lui aussi.
Tout tient dans le regard des intervenants lorsque le fils déclare qu'il veut assumer son acte et se livrer...
et j'adore le pétage de plomb du père. Encore une fois, plein de questions jaillissent, jusqu'au geste final. On respire ensuite avec le sketch de Ricardo Darin...
en tous cas à la fin ! car
l'oppression est là tout du long, un tissu de petites injustices et de petites humiliations du quotidien, qu'on connait tous. Rien de grave, pris séparément. A peine un battement d'aile de papillon... Et c'est l'apothéose avec le mariage, à la fin. Là oui, c'est une belle comédie méchante et jouissive. Qui nous offre non pas un twist mais une valse finale, toute ambigüe aussi, qui me réjouit. Drôle de film en vérité.