(...) Luis Tosar est un des plus grands acteurs du monde, qui a tenté sa chance aux USA pendant quelques années (le grand méchant de "Miami Vice", c'était lui), avant de revenir au pays, lassé des propositions uniformes qu'on lui proposait. Il se fera véritablement un nom sur la scène mondiale avec son rôle de chef d'une émeute en prison dans le tétanisant et éprouvant "Cellule 211", véritable chef d'oeuvre du genre film de prison, mais aussi grand film tout court. Ici, il est tout simplement grandiose, très démonstratif bien sûr, mais d'une justesse ahurissante. Plus le film avance, plus sa carapace se fissure, il alterne moments de détresse avec d'autres où il émane de lui une colère froide et intimidante, sans oublier quelques passages où il est plus vulnérable, pieds et poings liés par une situation qui lui échappe. (...) Le scénario est efficace mais c'est surtout dans son introduction qu'il marque des points. Il présente en effet la famille de quatre en à peine cinq minutes et deux scènes ! Les dialogues ne sont pas très signifiants dans la cuisine, mais ce sont plutôt les actions de chacun qui compte : la fille est pendue aux textos de son téléphone, son petit frère fait lécher les biscuits de sa sœur au chien avant de les lui rendre et de la taquiner, le mari est lui aussi accroché au téléphone tandis que la maman est débordée tout en tenant les rênes du timing. Dehors, les dialogues prennent plus d'importance avec les tensions palpables entre les époux tandis que le 1er élément perturbateur est relevé par le fiston (on apprend aussi que ce dernier a quelques soucis à l'école, ce qui ne sera pas vraiment important par la suite) : les portières de la voiture sont ouvertes lors de leur arrivée, sans pour autant alerter le paternel. Une véritable leçon d'écriture, minutieuse, qui nous présente les personnages avec peu de dialogues, le tout illustré par un découpage très rapide, tout en caméra à l'épaule, ce qui instille à la fois une certaine tension nerveuse mais aussi une petite instabilité. Le reste sera à l'avenant, avec un scénario parfois très bavard (mais qui raconte des choses, dévoile des infos ou relance les péripéties) et un découpage très rapide, qui varie énormément ses angles de prises de vue dans l'habitacle avant de proposer autre chose à partir du milieu du film. A l'instar de "Cellule 211", le film compile et enfile les poncifs du genre à très grande vitesse avant de vriller au milieu du film, faisant certes retomber le rythme, mais proposant une autre approche, à la fois visuellement mais aussi dans son écriture, qui prend un tour plus psychologique. On trouve aussi un plan-séquence absolument bluffant, un plan fixe avec la caméra situé au milieu de l'habitacle, qui suit le héros dans une manœuvre avant un événement qui fait basculer la dramaturgie. Le plan continue ensuite, proposant à la fois une immersion totale mais aussi une tension palpable, le tout accentué par un jeu d'acteur impeccable. (...) Si on peut regretter une photo un peu trop désaturée (effet de mode un poil agaçant), on est face à un film d'une facture technique assez bluffante, qui sait varier ses angles de vue, proposant à l'occasion des cadres qui font sens, avec un montage toujours au service de l'histoire. Autre petit défaut, c'est un rythme un peu épuisant, qui va trop vite au début, qui ralentit un peu trop au milieu avant de finir en trombe. Du coup, le temps paraît un peu long mais ce ralentissement sert aussi à développer les personnages et les enjeux.Il en résulte un thriller prenant, diablement efficace, qui joue habilement avec ses rebondissements mais aussi ses effets de style, proposant quelques scènes incroyables, jouant avec nos émotions, nos croyances et nos jugements. La critique complète sur thisismymovies.over-blog.com