Une adaptation de Simenon par Mathieu Amalric qui vaut surtout par le travail minutieux du metteur en scène. Chaque plan semble découpé au scalpel, chaque cadrage choisi précisément, chaque scène renvoyer à une autre. Ce travail de fourmi est permis par la durée brève de "La chambre bleue" (2014). Amalric a d'ailleurs choisi le format suranné du 4/3, peut-être pour rappeler que le récit original se situait dans les années 60. L'originalité de ce polar provincial est sa construction inversée, avec la mise en cause d'un coupable sans qu'on sache encore de quel crime il s'agit. L'alternance de scènes présentes (le différents interrogatoires du prévenu) et de flashbacks (la liaison et les scènes domestiques) donne toute sa complexité au récit. Un mot sur le casting : Amalric est convaincant, Léa Drucker un peu discrète, Laurent Poitrenaux parfait en juge d'instruction (idem pour le psychologue, impeccable). Dommage simplement que Stéphanie Cléau, compagne d'Amalric à la ville, sans démériter, épouse assez mal l'idée que je me fais de la femme fatale...
Amalric s'offre un exercice de style déroutant qui ne manque pas de qualités. Visuellement, c'est son film le plus ambitieux et le plus abouti. Le travail du chef opérateur Christophe Beaucarne sur le cadre et la lumière est magistral. Rien vu d'aussi maitrisé en format 4/3 depuis "Ida" de Pawlikowski - dont c'était le seul mérite. Amalric semble avoir composé son film comme une pièce d'orfèvrerie. Tout le charme de cette "Chambre Bleue" est concentré là, dans cet exercice virtuose qui démontre un savoir-faire désormais impressionnant. Reste le fond. Un roman de Simenon avec tous les ingrédients qu'on peut s'attendre à y trouver : une affaire de mœurs dans un contexte provincial bourgeois, qui vire au drame passionnel. L'interprétation est globalement excellente. Laurent Poitrenaux, en particulier, est parfait en juge d'instruction, tout comme Serge Bozon en flic. Mais l'intrigue ne décolle pas de l'anecdote. Malgré les efforts d'Amalric pour essayer de donner de la chair - au propre et au figuré - à son histoire, on ne sort pas des chemins balisés d'un épisode de Maigret. Dommage. "Tournée" était plus bancal mais quelques séquences valaient leur pesant de chaleur humaine, palpitaient de personnages haut en couleur, comme la pompiste inoubliable (Aurelia Petit). "La chambre bleue" reste glacée, l'émotion n'y affleure jamais ; si le film intrigue et passionne souvent, c'est par ses seules qualités esthétiques et formelles.
J'ai beaucoup aimé ce film. Les acteurs sobres et justes, la réalisation soignée qui prend son temps sans être ennuyeuse, la beauté de certains plans comme des photos illustrant le roman dont le film est tiré. Je n'ai pas lu le livre de Georges Simmenon mais le film donne une impression de fidélité et dégage une atmosphère très littéraire. Et puis cette fin qui nous laisse en suspend mais sans sentiment de frustration de ne pas vraiment savoir. Bravo à Mathieu Amalric qui nous livre un film très abouti visuellement en exploitant à merveille un récit d'une grande qualité.
Avec la chambre bleue et après "tournée", Mathieu Amalric signe un film policier à l'ancienne, tout en nuances, adapté d'un roman de Simenon. Plus le film avance, plus le doute est permis quant à l'intrigue et les ambiguités demeurent jusqu'au dénouement final. Les acteurs sont bons, le jeu réaliste, le tout peut faire penser à du Claude Chabrol. J'ai personnellement préféré ce film à tournée, qu'avait réalisé Mathieu Amalric.
Adapté du roman de Georges Simenon, "La Chambre bleue" est un film à la construction simple avec des va-et-vient entre une salle d'interrogatoire et le quotidien récent de Julien Gahyde (Mathieu Amalric) mais demeure pourtant déroutant. Car pendant près d'une heure, avant la séquence du tribunal, on peine à saisir de quoi est accusé Julien, plongeant ainsi le film dans une dimension kafkaïenne inquiétante. À la manière d'un puzzle, le cinéaste reconstitue des fragments – les souvenirs du personnage – qui dédouanent l'accusé ou, au contraire, en font un potentiel assassin, comme lors de la meilleure scène du film où Julien et Delphine (Léa Drucker excellente dans un jeu décalé) s'amusent à se mettre la tête sous l'eau à la mer, jusqu'à ce que le mari insiste lourdement en mettant en danger la vie de sa femme. Hormis l'épilogue contraint de régler le sort judiciaire des deux accusés (Julien et sa maîtresse), le film baigne plutôt en eaux troubles en prenant le contre-pied d'une affaire classique où il s'agirait avant tout de déterminer un coupable. Julien tente de donner au juge des éléments qui feraient de lui un innocent mais ne peut apporter de preuves formelles. Amalric met donc en scène une descente aux enfers labyrinthique et inéluctable, faite de jeux d'échos troublants (la goutte de sang / la goutte de la confiture ; le bleu de la chambre / celui du tribunal ) et de répétitions de dialogues qui insistent sur la chute du couple adultère. Film de formaliste séduisant quoiqu'un brin mécanique, "La Chambre bleue" est un polar atypique qui donne envie de lire le roman de Simenon.
Adapté du roman éponyme de Georges Simenon, ce thriller énigmatique, première réalisation de Mathieu Amalric, possède un remarquable scénario, une bluffante mise en scène et est interprété par un casting idéalement servi. Une vraie réussite !
Singulier, séduisant, maîtrisé et fascinant, La Chambre Bleue est une spirale cinématographique troublante et tortueuse dans laquelle on est happé sans contrôle. Drame sensuel, romance passionnelle, thriller haletant et policier hitchcockien, un film aux multiples reflets, ce qui lui va comme un gant avec sa capacité à jouer de l’art du faux-semblant.
Si La Chambre Bleue est plaisant d’un point de vue esthétique, le film est beaucoup trop lourd pour en faire un polar intéressant et vivant. On garde donc un bon souvenir de la mise en scène et de l’esthétisme sophistiqué de Mathieu Amalric mais le contenu reste malgré tout pâlot et ennuyeux. Légère déception pour un des films les plus attendus de ce festival.
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un bon policier bien écrit et bien mis en scène. le suspens reste entier même après le dénouement car on se pose pas mal de questions. le trio est très performant ainsi que le rôle du juge. mon seul regret ce visionnage au madeleine à Marseille où sur la moitié de l'écran déjà petit il n'y avait pas de film peut-être était ce fait exprès je n'en sais rien.
c'est la vioque qui a fait le coup! non? comment ça non? ah bon? ben c'est qui alors? lui? elle? comment ça, on ne sait pas? ben c'est quoi l'intérêt de ce film alors? ahhhhhhhhh perdre 1h15 de sa vie. ah oui, tiens,c'est un concept...
C'est avec une subtilité inouïe qu'Amalric met en scène le roman de Simenon, une espèce de trouble lyrique porté par une image troublante et magnifique. Le montage, tout en décalages porte à l'écran l’intensité des personnages, perdus, parfois autant que le spectateur (et ceci en bien comme en mal).
Un film davantage centré sur la question de la passion amoureuse et du schéma de dépendance qui en résulte que de l'intrigue policière en elle même, finalement secondaire dans sa vérité. Il en résulte quelque chose d'intimiste, d'écrit, de poétique, à cent lieues d'un classique polar à la Maigret. J'ai aimé la construction habile, et la manière de décrire la relation adultérine qui est ici (comme souvent dans la vraie vie) un accident, lié au hasard d'une rencontre et totalement désaccouplé d'un prétendu supplément de vertu qu'on trouverait chez l'autre. Amalric se filme bien souvent stupéfait, dans l'incompréhension des autres mais aussi de lui même, et c'est très bien vu. Qui manipule vraiment l'autre, n'est ce pas en général dans ce genre de relation (souvent aux conséquences heureusement moins dramatiques) assez partagé?