La pièce de théâtre « Macbeth » est poursuivie, par pure superstition, et depuis toujours d’une aura assez négative, qui semble frapper également les adaptations cinématographiques. Les deux plus notables, étant celle de Welles en 1948 et celle de Polanski en 1971 et qui furent de cuisants échecs. L’adaptation de Kurzel semble suivre les mêmes traces, accueil mitigé à Cannes, peu d’engouement pour le public avec un démarrage des plus confidentiels.
Si la trame générale est presque respectée à la lettre, la fin étant tout de même un peu cafouilleuse, l’intention de Kurzel se veut plus ambitieuse, dans les représentations des combats notamment, mais surtout au niveau de l’approche psychologique des personnages. La caméra se focalisant exclusivement sur le personnage de Macbeth, dont beaucoup de scènes suggestives (hors du cadre formel du texte) sont ajoutées pour mieux souligner sa culpabilité tout en le dédaignant de sa responsabilité (errance, affliction…). Pour autant, (et il rejoint dans ce sens Polanski) il n’accable pas Lady Macbeth dont l’importance est elle minorée à l’écran. Sa vision du drame repose donc sur les forces du bien et du mal, qui croisant le fer, transforme un honnête homme, valeureux quoiqu’un peu limité, en monstre sanguinaire boursoufflé de remords. Ce destin tragique, trouve écho dans notre histoire collective et résonne encore au présent. La fatalité nourrit parfois le pouvoir de ses noirs dessins, que seules la justice et la probité peuvent détourner.
Au final que retient-on du film ? Des scènes da batailles hallucinées où se mêlent grandiloquence et forme ésotérique, avec ses jeux de ralentis, d’ombres et de brouillards, mais aussi une certaine puissance visuelle (visages, stylisation des morts, montage astucieux…). L’interprétation est respectable, Michael Fassbender, excellent, semble totalement habité par son rôle. Marion Cotillard quant à elle surprend, malgré le peu de « restes » que lui donne à jouer Kurzel, et l’on aurait aimé la voir se donner plus encore à un rôle plus déterminant (celui voulu par Shakespeare), car elle a la trempe de la tragédienne, ce qui n’était pas joué d’avance. L’ensemble technique est également soigné, notamment sur le choix et la création des décors de Nick Dent (la chapelle est une merveille de reconstitution) dont on aurait apprécié un attrait plus symbolique, voir expressionniste (comme c’était le cas dans la version de Welles). La partition musicale quant à elle est somptueusement gravée dans l’action.
Sincèrement, je ne participerai pas au concert de sifflements qui souffle sur la tête de Kurzel, son film reste relativement honnête, même s’il vient passablement débaucher l’œuvre originale. Dans ce genre de process, tout est question d’appréciation personnelle, entre puristes s’offusquant de la moindre disparation d’un pied, ou d’un vers à ceux plus iconoclastes criant à hue et à dia au dépoussiérage, chacun se fera sa propre opinion, pour ma part j’ai adhéré, mais jamais été transporté.