Jean Becker, réalisateur d’Effroyables jardins, Les enfants du marais et d’Un crime au Paradis, sait nous émouvoir aussi bien qu’il sait nous ennuyer. Alors qu’il réunissait les meilleurs acteurs tragi-comiques de leur génération, Dussollier et Villeret en tête, il avait aussi offert à Jean-Pierre Darroussin l’un des rôles les plus fades de sa carrière dans Dialogue avec mon jardinier ersatz sans saveur des thématiques guédiguiennes. Avec Bon rétablissement !, mené par un Gérard Lanvin aussi blasé que son personnage, Jean Becker propose à nouveau une comédie sans rire, et un drame social sans pleurs.
Pierre Laurent (ne cherchez pas d’analogie avec le secrétaire nationale du PCF) est victime d’un accident de la route et se retrouve plongez dans la Seine. Camille (Swann Arlaud), un jeune gay qui se prostitue pour payer ses études, se jette à l’eau pour le sauver. Se réveillant à l’hôpital, Pierre va recevoir de nombreuses visites, son frère Hervé (Jean-Pierre Daroussin), son meilleur ami Serge (Daniel Guichard) et son ancienne maîtresse Florence (Anne-Sophie Lapix). Il va également se lier d’amitié avec l’infirmière Myriam (Claudia Tagbo), le flic chargé de l’enquête Maxime (Fred Testot) et une jeune fille enceinte Maëva (Mona Jabeur).
Dans la galerie de personnage qui envahissent la chambre de Pierre, le rescapé, il y avait de quoi trouver de véritables moments comiques, quitte à forcer un peu le ton. Malheureusement, Jean Becker verse dans un naturalisme bon teint qui désamorce toutes ses tentatives d’excentricités. Alors qu’il aborde des sujets graves, voir carrément sérieux : la prostitution étudiante, l’homophobie en milieu familial, ou bien la maternité des mineures, Becker pose un regard si détaché sur les événements, une sorte de bienveillance exacerbée qu’il ne semble même plus les dénoncer. Pierre est à l’image du film, un personnage très gentil, s’intéressant aux autres, et qui ne convainc même pas quand il est en colère. Mais justement, les injustices dont il est témoin réclame qu’on ressente son ressenti à l’écran. Alors qu’il donne dans les questions sociales, le cinéma de Becker s’efforce souvent de montrer sans dénoncer, il arrive à traiter des sujets durs sans appeler le spectateur à réagir. Tout semble passer à travers un filtre aseptisant. Ainsi, le personnage principale est dépité par tout, sans jamais poussé une gueulante, ni jamais réellement saisir les problèmes à bras le corps. Ainsi, la petite gamine de 14 ans n’a qu’à le rassurer en lui disant qu’elle va se marier à un homme de 20 ans pour avoir son indépendance, Pierre l’embrasse et la laisse partir. Alors, bien sur, me direz-vous, on ne peut pas porter tout le poids du monde sur ses épaules, mais ici, Pierre semble juste accepter que c’est notre époque. À l’image du nouveau-né que Maëva appellera Djustin… Alors que non, ni le mauvais goût en matière de prénoms ni les filles-mères ne sont des fatalités qu’il nous faudrait accepter.
Ajoutons à cela que l’ambiance générale fait tomber toutes les tentatives de nous faire rire, Bon rétablissement n’apporte rien. Sous un vernis de comédie très léger et malgré un casting prometteur, Bon rétablissement aborde des thèmes de sociétés intéressants mais tellement survolés qu’on n’arrive pas à en ressentir la moindre émotion.
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