Dernier né des studios Aardman, Shaun le Mouton a quitté le format télévisuel pour être adapté sur grand écran. Marque de fabrique d’Aardman, l’animation à base de pâte à modeler a été popularisée notamment par la célèbre saga Wallace et Gromit. Et c’est une technique qui a toujours de quoi fasciner surtout quand on sait qu’il faut une journée de travail pour produire environ 2 secondes de film. Au vu de l’énergie fournie par ces créateurs généreux et passionnés, difficile de partir avec l’envie de ne pas aimer ce genre de projet. Mais bon, fournir un gros travail n’est pas toujours synonyme de succès. Il paraît d’ailleurs qu’un certain film de Jamel Debbouze a nécessité 7 ans de boulot et quand on voit le résultat… Qu’en est-il alors de ce Shaun le Mouton ?
J’ai beaucoup aimé les quelques films en « patanimation » que j’ai pu voir auparavant, avec une mention spéciale pour cette pépite qu’est Un Mauvais Pantalon. Et ce Shaun le mouton ne déroge pas à la règle, c’était vraiment un moment de cinéma très sympathique. J’ai bien ri et souri devant ce spectacle aussi inventif que dynamique. Car si l’humour et le scénario ne sont pas toujours très fins, il est difficile de s’ennuyer face à cet enchaînement de péripéties sans aucun temps mort.
On peut noter tout d’abord la qualité de l’animation qui, au risque de me répéter, a demandé un travail titanesque et qui est ici remarquable de fluidité. L’action est retranscrite sans anicroches, on en oublierait presque qu’il s’agit de personnages et objets en pâte à modeler filmés en stop-motion. En plus c’est bourré d’idées et créatif. Visuellement ce Shaun le mouton est vraiment génial, l’univers est notamment garni de détails qui le rendent vraiment vivant et riche. L’atmosphère du film est aussi captivante grâce à ces références sociétales qui peuvent prêter à sourire. On retrouve dans Shaun le Mouton une retranscription de notre société avec ses phénomènes de mode ou encore cette vie urbaine que nous connaissons bien et qui est ici gentiment tournée en dérision.
J’avoue d’ailleurs m’être amusé comme un gamin face à ce déferlement de gags et de rebondissements. Les trouvailles et inventions loufoques m’ont ramené des années en arrière à l’époque où je créais des histoires avec des jouets, des dessins et même de la pâte à modeler. Comme quasiment tous les gamins du monde en quelque sorte. Et quelque part je suis sûr que c’est aussi pour ça que le film m’a parlé car ça m’a donné envie de faire comme les réalisateurs du film, de recréer ces petites histoires d’enfants. Comme quoi à l’heure du tout numérique, ça fait du bien de retrouver un bon film artisanal comme ça réalisé avec cette générosité qui ne peut qu’attirer de la sympathie.
Après le film n’est pas forcément exempt de tous reproches dans la mesure où il emprunte des sentiers assez convenus. Forcément, c’est une œuvre tous publics qui cherche aussi à s’adapter à une gamme de spectateurs élargie, la fameuse tranche de 7 à 77 ans. Donc c’est tout mignon, parfois un peu facile et sans forcément une grosse audace sur le plan du scénario. Toutefois je dirais que paradoxalement c’est aussi ce qui fait la force du film, il est capable de fédérer tout le monde grâce à un humour qui touchera parfois plus les petits que les grands, et inversement. Et comme tout ça se déroule sur un rythme effréné, personne n’est laissé de côté. Et mine de rien, peu de films savent vraiment faire ça, trouver ce savant dosage qui formera un film tous publics et pas seulement pour enfants. Et c’est aussi à ça qu’on reconnaît un film d’animation grand public de qualité.
Globalement le film reste vraiment drôle et évite justement de trop sombrer dans l’humour caca-prout. C’est plus inventif que ça et heureusement. Il y a d’ailleurs un running gag excellent dans la fourrière avec le chien aux yeux rouges qui faisait toujours son petit effet à chaque coup. Puis cette bande de moutons accompagnée du chien berger est attachante. Aucun dialogue n’est prononcé par qui que ce soit mais on a quelques personnalités qui se dessinent, ce qui donne vie à ces personnages, ce qui les fait exister. On s’attache donc plus facilement à eux, ce qui amplifie toutes les émotions que l’on peut ressentir dans ce genre de films. Au niveau de l’humour bien sûr mais pas seulement. A ce titre d’ailleurs, j’ai trouvé la scène où ils improvisent un orchestre pour redonner le sourire à l’agneau vraiment attendrissante. Cette touche poétique légère mais bien réelle est très appréciable, elle contribue à figer ce petit sourire qu’on peut facilement arborer tout le long du film. En ça, on peut dire que ce Shaun le Mouton est un feel-good movie très réussi.
Voilà donc une très bonne surprise car je n’en attendais pas forcément grand chose. Ce n’est pas parfait, on peut reprocher quelques défauts à juste titre mais il me paraît très difficile de pouvoir détester ce film. Il a cette capacité de réveiller nos âmes de gamins, est très divertissant et a ce qu’il faut d’inventivité pour ne pas s’essouffler sur la durée. Le scénario est bien mené et ficelé, ce qui donne un véritable liant et confère habilement au film cette sensation d’aventure. Il a en tout cas su plaire au jeune adulte et grand enfant que je suis, et j’en suis sorti avec un énorme sourire figé sur les lèvres. Et après tout, quand on regarde une comédie c’est tout ce qui compte. Un petit régal, vraiment agréable.