Découvrir un Woody Allen, c'est un peu comme exécuter une mission de déminage dans un Bagdad enneigé : on a très peu de chance d'être satisfait du résultat, mais quand on l'est, c'est vraiment une partie de plaisir. Non, forcément, j'exagère, mais sa carrière est inégale, et tous ses films ne sont pas de qualités. Parce que Woody Allen tourne beaucoup. Beaucoup trop ? À 78 ans, il continue une production régulière d'un film par an (tous les 18 mois en moyenne), au risque de se vautrer et de décevoir les fans. Globalement, il y n'y a eu que peu de ses films qui ne m'ont vraiment pas plu ; "Minuit à Paris" est donc plus ou moins une exception bien qu'il soit très apprécié par la presse et même par le public. Bon revenons-en au film à présent. "Magic in the Moonlight" (titre on ne peut mieux choisi), est un retour à la poésie, si caractéristique de certains des films d'Allen, style "La Rose pourpre du Caire". C'est aussi une re-renaissance pour Colin Firth, qui depuis trois ans, n'était pas au plus haut de sa forme, avouons-le... Comme toujours flanqué d'un casting brillant, Allen filme la côte d'Azur avec son savoir-faire habituel. La musique (des thèmes classiques et simples de Jazz, comme dans "Le Sortilège du Scorpion de Jade" par exemple, fréquents chez Allen), les dialogues mordants récités par des comédiens excellents, et la photographie éblouissante de couleurs, tout dans ce film provoque l'émerveillement. "Magic in the Moonlight" se situe dans les années 20 - période décidément préférée du réalisateur - et nous dépeint l'histoire de Wei Ling Soo, prestidigitateur de renom - d'après lui le meilleur au monde - alias Stanley Crawford, qui a aussi fait parler de lui en démasquant de nombreux faux-médiums. Un jour, il tombe sur Sophie Baker, jolie minois et prétendue communicante avec l'au-delà, mais tout porte à croire qu'elle est réellement médium... Emma Stone incarne avec vivacité et élégance ce personnage haut en couleur et forme avec Colin Firth un incroyable duo caustique. Ce-dernier prend l'attitude, les mots, la morale de l'éternel héros Allennien souvent incarné par Woody himself. Il joue le mec pessimiste, sarcastique, sûr de lui, non dénué d'humour mais souvent désobligeant avec son entourage. Son rôle de magicien est clairement inspiré d'Houdini, l'illusionniste le plus marquant du siècle dernier, que ce soit dans "sa chasse aux pseudos-médiums" ou dans certains de ses "tours". Et de par ce thème, Allen pose les grandes questions de la vie (mort, croyance, bonheur...). Le seul défaut serait les quelques longueurs présentes à la fin, mais rien de bien grave... À voir !