Le Quepa sur la Vilni ! … Qu’en dire ? Eh bien, un vent de liberté s’en dégage, son casting est rigolo – un chanteur, un cycliste, un comique : qui dit mieux ? -, mais ses idées de scénario restent extrêmement limitées. Jugez plutôt : une bande de jeunes emmenée par un facteur à la retraite se doit de faire la promotion de l’inauguration d’un petit cinéma local, et de l’ouverture avec le film Panique sur la ville – sorte de mélange entre Peur sur la ville et Panique au village. Alors, là, attention au gag – très subtil, pas du tout appuyé ni répétitif, mais les syllabes du titre que chacun des trublions porte sur son dos en roulant en vélo vont, attention, attention, se mélanger ! Sinon le maire un peu perché interprété par un Christophe barbu tout en blanc se prend pour on ne sait trop qui – Moïse ou Jésus – avec ses allures de prophète du dimanche tout en dissertant avec un vigneron avec un fort accent du Sud, les jeunes gens emmenés par l’ex-facteur Bernard Ménez découvre les plaisirs de la chair, la “femme-point d’exclamation” rejoint tardivement la petite troupe, il y a une escale chez un maire hédoniste et qui embrasse tout le monde sur la bouche à la russe, un jeune homme se prend pour Tarzan en se frappant énergiquement sur le torse et en baptisant une des deux jeunes filles de la troupe à l’opulente poitrine Jeanne, un dénommé Momo – interprété par Damien Jouillerot vu dans plusieurs films, notamment Effroyables Jardins de Jacques Becker (2002) ou encore Les Fautes d’Orthographe de Jean-Jacques Zilbermann (2003) – bouffe beaucoup, et, n’oublions pas, Bernard Hinault fait des petites apparitions et prodigue des conseils de cyclisme à un des jeunes qui s’appelle comme lui Bernard. Avouons-le : on peine à s’intéresser à un scénario totalement centrifuge qui part dans tous les sens sans qu’on comprenne trop où il veuille en fait aller ; pire, il ne nous raconte au fond pas grand’chose, à force de commencer à emprunter timidement tel et tel chemin à la fois. L’indéfectible sympathie que nous inspire cependant quand même le projet dans sa fondamentale étrangeté et originalité nous empêchent de le massacrer impitoyablement, mais concédons que le film finit par se réduire à l’anecdote. Les images sont jolies – avec en plus dessus à la fin Les paradis perdus de personne d’autre que… Christophe – mais une question demeure à la bouche du spectateur : “Pourquoi ?”
À ce tour en vélo où les syllabes d’un titre de film se mélangent, on préférera (largement) l’autre moyen-métrage qui accompagne celui-là en salles : à savoir le dénommé Je sens le beat qui monte en moi, présenté au festival de Locarno en 2013, et dans lequel un chauffeur amoureux de Northern Folk tombe amoureux d’une guide touristique qui s’agite à la moindre note de musique. Semblable à l’autre dans son côté “film-concept”, Je sens le beat qui monte en moi s’avère en revanche beaucoup plus réussi. Le concept choisi en l’occurrence arrive à alimenter sans peine trente bonnes minutes, et la mécanique burlesque de deux corps qui essayent de communiquer et de se rapprocher avec difficulté fonctionne à fond, nous offrant plusieurs scènes extrêmement réjouissantes – tant sur le plan comique que musical. Là aussi, casting assez détonant, entre l’excentrique Serge Bozon au débit extrêmement rapide – – et l’étonnante danseuse et chorégraphe trentenaire Rosalba Torres Guerrero, dont on retient notamment laes sourcils masculins et broussailleux ainsi que la grâce maladroite de ballerine enfermée . Surtout pour Je sens le beat qui monte en moi, mais aussi pour ses castings hétéroclites et amusants, son sens du burlesque et de l’étrangeté, retenons donc le nom de Yann Le Quellec, même si on garde certaines réserves sur le scénario du Quepa sur la Vilni !. Je sens le beat qui monte en moi nous laisse en effet espérer que Yann Le Quellec pourra assurer, aux côtés notamment du trio Fiona Abel, Dominique Gordon, Bruno Romy (avec L’Iceberg en 2006, Rumba en 2008, et La Fée en 2011), la relève du burlesque contemporain.