Heli est un long métrage que j'ai réussi à voir vendredi dernier lors de mon passage au Festival de Beaune, qui mettait en avant le cinéma mexicain contemporain. Il s'agit d'Héli, qui ,après Nebraska la semaine passé,est un autre film primé à Cannes 2013 sort encore sur les écrans près d'un après,, le film d'Amat Escalante, récompensé du prix de la Mise en Scène.
Heli, qui sort donc aujourd'hui dans les salles, est certainement un des films qui a fait le plus polémique lors du Festival de Cannes de l'an passé, et si il ne sort que maintenant, malgré son prix de la mise en scène, c'est peut- être pour faire retomber derrière lui l'odeur de souffre qu'il a pu laisser derrière lui.
Car il faut le dire sans hésiter, Heli est une experience assez éprouvante à vivre au cinéma, contenant 3 ou 4 plans séquences à la limite du soutenable (à coté d'elles, les longs plans séquences de 12 years a slave sont presque du Bisounours), qui plongent parfois le spectateur dans une position de voyeur pas forcément très agréable.
D'ailleurs, à Beaune, le public, pas forcément habitué à ce genre de cinéma radical, a plusieurs fois détourné les yeux en poussant des "rhoo"... D'ailleurs pour les rares égarés qui ne savaient pas forcément à quoi s'attendre ( ca peut arriver dans un festival, puisqu'on va parfois voir un film par défaut quand la salle du film qu'on escomptait est complète), le film annonce la couleur dès la première scène avec le gros plan du visage ensanglanté d’un jeune homme, trainé comme un animal dans le coffre d’un vieux camion et qui finit pendu le long d'un pont surplombant un autoroute.
Personnellement, j'étais déjà au courant du climat pas du tout confortable dans lequel le film allait me plonger, car même si je n'avais jamais vu de film d'Amat Escalante (réalisateur entre autres de Los Bastardos en 2008), il est de la mouvance d'un certain cinéma mexicain, dont le chef de film est Carlos Reygadas (qui avait également recu le prix de la mise en scène à Cannes l'année précédente avec) Post Tenebras Lux), un cinéma qui se propose de nous raconter la société mexicaine, et plus particulièrement sa jeunesse, de manière la plus crue et la moins glamour possible, avec des longs plans fixes, contemplatifs, à l'inverse d'un cinéma clinquant de Tarantino ou Scorsese.
C'est d'ailleurs pour cela que ces scènes sont particulièrement difficiles à regarder : plus on est dans l'ultra réalisme avec des plans qui s'étirent au maximum sans aucun effet de mise en scène, plus on a l'impression que ces horreurs se déroulent réellement sous nos yeux.
Cela dit, j'avais un peu peur que cette très grande exigence formelle soit l'arbre qui cache la foret d'un scénario un peu inexisant, justement comme ce Post Tenebras Lux qui m'avait complétement laissé de côté à cause d'une intrigue complétement obscure.
Or, ce n'est pas le cas ici: même si la lenteur de certaines scènes peut nous faire lacher parfois, il y a une vraie histoire dans ce film d'Amat Escalante, puisque Héli est en fait le nom de ce jeune garçon qui vit tant bien que mal avec sa femme son bébé, sa soeur de 13 ans et son père et qui va se retrouver plonger dans un enfer total à cause des mauvaises fréquentations de sa soeur qui vont se venger d'une façon absolument atroce
On y voit alors une vision du Mexique assez terrifiante, gangrénée par la corruption et la violence, vision assez terrifiante d'un pays où il ne fait pas bon du tout à vivre, où les ordures sont partout, et chez les narcotrafiquants, et chez l'armée, et chez la police, et où les gens qui essaient de vivre de façon honnête se retrouvent malgré eux dans cet univers complètement pourri.
Bref, un film, qui par son fond et sa forme est vraiment l'anti good movie (je l'ai vu juste après Abus de Mistral et le Lelouch, c'est un peu l'exact inversé :o) qui donne une vision de l'humanité vraiment pas positive, et qui n'est pas à conseiller à tout le monde.
Mais, en même temps, le film ne peut pas être balayé d'un revers de la veste comme certains critiques l'ont fait à Cannes, car Heli témoigne pendant tout le film d'une intelligence et d'une maitrise incroyable dans la mise en scène avec une perfection plastique et un sens du montage et surtout du cadrage assez hallucinant et qui font de ce Heli autre chose qu'un cinéma radical, vain et provoquant.