"Le cœur battant" est le 3ème long métrage du réalisateur italien Roberto Minervini, mais le premier à sortir en France. Ce film était présenté à Cannes 2013, en sélection officielle, en séance spéciale. Comme les 2 films précédents de Minervini au Texas, état dans lequel le réalisateur vit depuis plusieurs années. Pour réaliser "Le cœur battant", Minervini s'est immergé dans une vraie famille, père mère et 12 enfants, famille très, très pieuse, famille qu'il connait depuis plusieurs années et dont certains membres étaient déjà apparus dans ses films précédents. Dans cette famille Carlson, pas question d'envoyer les enfants dans une école extérieure : c'est la mère qui éduque ses enfants, c'est elle qui met dans la tête de ses filles que c'est grâce à Adam qu'elles sont sur terre, car il avait besoin d'aide et donc, par conséquent, les femmes sont sur terre pour servir les hommes. CQFD ! Le Texas est aussi la terre des rodéos, et Colby, un jeune monteur de taureaux ne laisse pas insensible Sara, une des filles, qui va commencer à s'interroger sur la vie qu'elle mène. Au point qu'elle va esquisser un semblant de révolte : elle clame à qui veut l'entendre qu'elle ne se mariera pas et qu'elle n'aura pas d'enfant. Ben dis-donc ! Une de ses sœurs manifeste elle l'envie d'aller vivre en Virginie. Pourquoi ? Parce que c'est là qu'est enterré Stonewall Jackson, un général de l'armée confédérée, par ailleurs très pieux et diacre de l'église presbytérienne. Vous pensiez peut-être que toutes les jeunes américaines étaient fan de Lady Gaga, de Miley Cirus ou de Justin Bieber : vous aviez tort !
Roberto Minervini se considère comme un cinéaste chasseur. Quand il commence son film, il n'a pas de scénario. Il tourne de longs plans séquence, en essayant de se faire le plus discret possible et quasiment en totale liberté. Une petite restriction : Sara refusait de prier à voix haute car ses prières ne sont destinées qu'à Dieu. Le scénario, c'est au moment du montage qu'il s'est élaboré, en relation avec Marie-Hélène Dozo, monteuse de nombreux films des Dardenne. Le film est apparu ambigüe à de nombreux spectateurs. Il est vrai que si on prend au 1er degré tout ce qu'on entend, on va penser que le réalisateur partage les valeurs de cette famille, représentante extrémiste de cet ensemble d'états des Etats-Unis qu'on appelle Bible Belt. La vérité est sans doute plus subtile : tout en ayant de la sympathie pour cette famille qui est comme elle est par tradition et par absence de réflexion intellectuelle, ce qu'il nous permet d'entendre est tellement gros qu'il ne peut pas ne pas y avoir ne serait-ce qu'un soupçon de dénonciation dans son film. Alors, excellent film, pensez vous ? Eh bien non, pas vraiment : c'est intéressant quant au sujet, c'est très bien filmé, mais ... c'est tellement contemplatif qu'on s'y ennuie pas mal. Dommage !