Un couple incarnant le Japon moderne, actif et citadin et parent d’un fils de 6 ans constitue la famille modèle nippone. Lui architecte est obsédé par sa propre réussite et compte bien passé le relais à un fils qu’il trouve trop gentil et pas assez combatif à son goût. Lorsqu’il apprend que l’hôpital où est né leur fils à interverti deux enfants ; il se trouve conforté dans l’idée qu’un enfant si doux ne peut être son fils. Un enfant lui ressemblant plus l’attend donc dans une autre famille. Cette autre famille modeste avec d’autres valeurs va lui permettre de confronter sa vision de la paternité avec d’autres modèles. Tous vont beaucoup souffrir de cette nouvelle donne.
Chouchou de Cannes depuis son premier film en compétition (« Nobody knows »), Kore Eda obtiendra en 2013 le Prix du Jury à Cannes des mains d’un président lui aussi très sensible aux histoires d’enfants dans ses propres films ; Steven Spielberg. Dans ce film le nippon explore encore une fois une thématique tournant autour de l’enfance. Il s’en en fait une spécialité et démontre énormément de talent pour filmer et diriger les enfants. Ici, le jeune Keita est émouvant à chaque plan. Le synopsis ne peut que rappeler, à nous français, le célèbre « La vie est long fleuve tranquille » ; le nippon nous en livre ici une version plus dramatique et surtout philosophique. En effet, ce film empile habilement les grilles de lecture ; mais le thème central écrasant tous les autres de part sa justesse est la question suivante : qu’est ce qui constitue la parentalité ? Ensuite d’autres interrogations sont subtilement abordées comme : l’enfant fait-il le parent ? L’acquis ou l’innée fait-il l’enfant ? La filiation résulte-t-elle des liens du sang ou du temps passé avec l’enfant ? Ici le père de Keita affirme que les gènes prédominent alors qu’il ne passe aucun moment avec son fils unique. L’autre père, dilettante consacre lui une grande partie de son temps à ses trois enfants. Pour illustrer son propos, ce film se concentre essentiellement sur les images plutôt que sur un contenu bavard et parle joliment de la parentalité. Cà permet à Kore Eda d’éviter très intelligemment tout apport de pathos.
Quelques critiques qui parlent encore mieux et souvent à juste titre en bien de ce film.
Cinema Teaser : « Un film lumineux et gorgé de vie, fort d’une énergie presque philosophique où rire et larmes ne font qu’un. »
Journal du dimanche : « En évitant les clichés et en rejetant tout sentimentalisme, le réalisateur tient jusqu'au bout le fil de l'émotion grâce à une mise en scène à l'image de la vie, faite de moments simples passés en famille et de dilemmes personnels, de fous rires et de larmes (...) Bouleversant. »
Le Parisien : « là où Etienne Chatiliez empruntait la voie royale de la comédie de mœurs, le Japonais Kore-eda explore le chemin bien plus escarpé du mélodrame intime, sur fond d’interrogations profondes sur les liens du sang. Il le fait avec justesse, élégance, sans le moindre pathos émotionnel, et son film est bouleversant du début à la fin. »
Positif : « Le cinéaste, plutôt que de labourer mécaniquement le champ du dilemme moral qui s'ouvre devant les deux couples (...), observe les uns et les autres, limite les dialogues et épure peu à peu le propos. (...) La manière distanciée et élégiaque dont le cinéaste évoque des questions essentielles est unique dans le cinéma contemporain. »
Avoir-Alire : « Le récit balisé du long métrage, dans les mains de n’importe quel faiseur, n’aurait donné lieu qu’à un téléfilm basique à peine agréable mais dans les mains du Japonais, l’œuvre se transforme en noble et vibrant film d’auteur. »
La Croix : « Les images à l’élégance soignée, l’interprétation tout en retenue, les situations abordées en affleurements successifs, la musique de Bach (...) forment une œuvre subtile, intelligemment bouleversante, qui multiplie les possibles en se gardant bien d’asséner des réponses. »
Les fiches du cinéma : « À petits pas, Kore-eda explore la filiation, s'interroge sur la place de l'enfant dans la famille, et tout simplement sur ce qui fait un parent (les gènes ou la transmission ?). Une émouvante fable moderne. »
L’Humanité : « Avec "Tel père, tel fils", Kore-eda Hirokazu transgresse les classes sociales, opposant de fait une certaine spiritualité à une forme de matérialisme. »
L’intelligence du propos écrase deux faiblesses majeures du film. Kore Eda ne revendique aucun réalisme et de fait sa mise en scène et son scénario souligne grossièrement et de manière caricaturale les différences majeures entre les deux familles (appartement aseptisé » et class contre logement en joyeux bordel / Tenues colorées contre tenues strictes et neutres / Père joueur et père austère). On aurait aussi apprécié de voir des enfants plus concernés par leur sort et plus acteur de l’histoire. Deux scènes seulement sur le film mettent les enfants au cœur du processus : les « pourquoi ? » à répétition de Ryu et le superbe plan final des retrouvailles entre Keita et son père.
A voir absolument