C’est la belle vie pour un jeune architecte, Ryoata, son épouse Midori et son fils Keita de 6 ans. Malheureusement, un évènement incongru va bouleverser leur vie de famille idéale : la maternité de l'hôpital où est né leur fils les contacte pour leur apprendre que deux nourrissons ont été échangés à la naissance. Le garçon qu’ils ont élevé n’est techniquement pas le leur, ce dernier ayant alors grandi au sein d’une famille modeste...Voilà le point de départ du nouveau film d’Hirokazu Kore-Eeda (qui nous avait déjà livré les bons "Distance", "Nobody Knows", "After Life" et "Air Doll"), qui n’est pas sans rappeler celui de "La Vie est un Long Fleuve Tranquille" (mais de là à dire que "Tel Père, Tel Fils" en est le remake, faut arrêter de boire les mecs !!). Mais, alors que le film d’Etienne Chatiliez mise tout son récit sur l’humour, Kore-Eeda lui va plus puiser du côté de la crise existencielle, la remise en cause des notions d’amour et de sanguinité : comment rester insensible devant ses familles confrontées à un dilemme insoluble « Les liens du sang sont-ils plus importants que l’amour que l’on a donné à celui que l’on croyait être la chair de notre chair ? ». Il commence dans un premier temps par nous immerger au sein du quotidien des deux familles, décrivant en prenant son temps mais avec une relative précision leur milieu social, leurs comportements, leurs gestes, leurs habitudes. Puis, le réalisateur choisit alors une voie inattendue : Ryota voit en cette révélation l’explication au fait que « son fils » n’arrive pas à être aussi bon que lui à l’école et en piano, et décide de faire avec l’autre famille un échange des deux garçons. Cette solution saugrenue, qui paraît la meilleure chose à faire pour Ryota, va pourtant assez rapidement prouver sa bêtise lorsque son fils biologique va enchaîner des « pourquoi ? » à tous ce que lui demandera Ryota, bien conscient du ridicule de la situation en jouant sur l'emploi des mots « papa » et « maman ». Et, alors que le reste des situations s’attache particulièrement aux différences entre les deux pères (Ryota est l’archétype absolu du cadre supérieur ambitieux, matérialiste, élèvant son enfant à la dure pour en faire un futur élite de la société ; alors que Yudai est un grand papa poule blagueur qui n’a comme projet pour ses enfants que de passer le plus de bons moments avec eux) ; Ryota va se retrouver devant le ridicule de la situation grâce aux deux garçons, l’un ne voulant pas devenir son fils, et l’autre qui ne veut plus revenir car il ne lui pardonne pas le fait de l’avoir abandonné. Et oui, car c’est à ce moment, alors qu’il ne croyait « ne pas l’aimer », que Ryota se rend compte à quel point il aime Keita (il n’y a qu’à voir sa présence lors du suivi de la scolarité de Keita ou de son apprentissage du piano) lorsqu’il découvre par le biais d’un appareil photo que ce dernier l’aime lui aussi énormément. Avec une simplicité et une virtuosité, Hirokazu Kore-Eeda arrive à nous émouvoir avec une telle puissance qu’il est difficile de contenir ses larmes. Très beau film loin des clichés mielleux des traditionnels mélodrames, "Tel Père, Tel Fils" est une ode à l’amour parental, un amour qui met en avant le fait que le cœur prévaut toujours sur le sang.