Une jeune fille mène une double vie: pour sa famille et son compagnon, c'est une thésarde en médecine. En réalité, elle a abandonné depuis longtemps son cursus, et se consacre désormais à l'accompagnement de mourants en phase terminale. Sujet brûlant, relativement peu abordé par le cinéma tout comme par la littérature, le "suicide assisté" est ici traité avec maestria par Valéria Golino. Pourtant novice en la matière, Golino montre ici qu'il faudra compter sur elle dans les années à venir. Une virtuose de la réalisation vient de naître. Consacrant la première partie du film à la peinture du quotidien de Miele, et la deuxième à toutes les retombées d'une péripétie bien trouvée(Irène finit par tomber sur un client qui lui ment et qui est en réalité en parfaite santé), Golino choisit une trame narrative classique et linéaire. A raison. Le spectateur est roué de plans magnifiquement filmés. Presque toutes les scènes sont travaillées. Sur chacune d'entre elles, la lumière, tantôt tamisée, tantôt aveuglante, est en parfaite harmonie avec l'atmosphère. J'irai même jusqu'à dire que je n'ai jamais vu autant de variété et d'originalité dans le cadrage et dans la mise en scène depuis un bon moment. Peut-être même est-ce la première fois. Une variété qui n'enlève rien à la qualité, bien au contraire. Prenons par exemple la première scène de "mise à mort". Le silence est clinique pendant la routine préparative de Miele. La luminosité est idéalement tamisée sur l'ensemble de la pièce, hormis sur la "patiente", qui reçoit en plein visage un rayon de soleil aveuglant. Toute l'attention est ainsi focalisée sur elle, et quand la musique d'accompagnement retentit, l'émotion est à son comble. Elle demande alors à Miele combien de temps il lui reste. "2 minutes". "C'est tout?". La musique s'emballe. La lumière vacille. Tout simplement magistral.
Le casting, quant à lui, regorge de talents. L'actrice principale, Jasmine Trinca, qui avait déjà fait ses preuves dans La Chambre du Fils , palme d'or 2001, trouve là son plus beau rôle à mes yeux. Les seconds rôles ne sont pas en reste, avec Carlo Cecchi et Libero de Rienzo, tous les deux justes dans leur interprétation de personnages pourtant pas si évidents à jouer.
Le cinéma transalpin a déjà fait fort cette année, avec notamment La Grande Bellazza, Moi et Toi, et maintenant Miele, tous les trois primés à Cannes. Mais c'est sans aucun doute le dernier qui restera le plus longtemps dans les annales: ce sera le premier film de la grande Valeria Golino. On prend les paris?