Vu il y a des année mais j'y repense aujourd'hui à l'occasion d'un post sur les réseaux sociaux, à propos de Adèle Haenel qui explique la remise en question nécessaire pour lutter contre le racisme lorsqu'on est une personnalité blanche. Et franchement je me rappelle de mon sentiment d'inconfort face à ce film de celle qu'elle aime tant Céline Sciamma.
Car Bande de filles sent, pour pas dire "pue", le film de blanche qui s'intéresse aux noires et les fétichise ou les romance à outrance, on sent que la personne qui se penche sur l'univers de cette banlieue et de cette jeunesse n'en ressort pas, et ça donne quelque chose de tout à fait bancal. Comme un excès de poétique mal avisée avec du pseudo cool qui efface le drame dans lequel se noient les personnages. J'avais pu assister à une avant-première à Amiens en présence de Céline Sciamma et les réactions dans la salle était pour le moins mitigée, on lui posait plein de questions, ça fusait et ce n'était sans doute pas un moment agréable pour la cinéaste. Pour ma part je me suis retenu de prendre le micro car j'aurais voulu lui demander où est la cohérence. Quand par exemple dans une scène les personnages embrouillent un vigile qui les suit dans un magasin "Quoi ? Tu nous prends pour des voleuses c'est ça ? Elles viennent de banlieue ça peut être que des voleuses ?" etc, puis quelques minutes plus tard, les mêmes personnages ressortent effectivement du magasin avec des articles volés et il me semble mortes de rire.
Et ça fait partie de l'aspect "road movie" très léger qui transpire un peu dans cette chorale de copines. Ca rend le tout "trop" fun, l'immersion ne permet pas de s'identifier, curieusement, ou en tous cas pas de comprendre grand chose et le mal de la cité est tellement mal représenté, cliché, surtout pour celui ou celle qui est né et a grandi dans un tel univers, que les seules choses qu'on apprécie vraiment c'est l'image. Des plans très beaux, stylisés, et cette séquence sans doute culte pour celles et ceux qui ont vu ce film, le fameux Shine Bright Like a Diamond de Rihanna. Moment excellent car beau à l'image, et... j'kiffe le son je dois avouer.
Mais le ton décalé, pas à sa place, il créé vraiment une étrange atmosphère, au lieu de regarder librement une situation, on sent surtout le poids du regard qui se pose sur elle. Sciamma expliquait lors de cette projection où je suis allé que l'envie de faire ce film lui est venue après avoir remarqué des gamines de banlieue qui foutaient le boxon dans un métro qu'elle prenait. Elle trouvait ça chiant, énervant, ça la saoulait, et elle s'est dit "Je devrais peut-être essayer de les comprendre ? De voir ce qu'est leur vrai quotidien, ce qu'elles vivent". Résultat une démarche tordue à mon sens, qui n'excuse ou n'explique rien de leur comportement de reloues, d'autant plus qu'elles s'enfoncent en permanence.
Je m'attendais à beaucoup mieux le jour où j'y suis allé. Et bref, quand j'entends Haenel expliquer qu'étant né.e.s dans ce modèle de société pensé par et pour les blancs, il faut savoir se remettre en question, j'espère qu'elle réalise que Céline Sciamma avait besoin après ce film de se sentir concernée. Car vraiment, il est mauvais sur le fond, bien que très beau sur la forme, avec de nombreux plans aux éclairages notamment magnifiques. Et malgré des comédiennes qui donnent tout ce qu'elles ont.
Plus tard j'ai vu Divines qui m'a mis une grande claque dans la face, j'en fais du coup l'alternative réussie à Bande de filles.