J'avais beaucoup aimé le précédent film de Céline Sciamma, Tomboy, l'histoire de cette petite fille qui préfère le foot aux poupées, les shorts aux jupes-qui-tournent, les cheveux archi-courts aux crinières et qui s'invente une identité de garçon. C'était fin, profond -je pense que c'est un sujet qui la touchait tout particulièrement, et qu'elle connaissait bien.
Il n'en est sûrement pas de même de Bande de Filles, qui est un catalogue de tous les clichés sur la vie des cités. On croirait une séquence d'Envoyé Spécial...
Marieme (Karidja Touré) vit dans une famille monoparentale, sa mère fait le ménage la nuit, elle a un grand frère qui fait régner la terreur et veille sur deux sœurs plus petites. Quand le film commence, elle est en face de sa conseillère d'éducation qui lui dit qu'après avoir déjà redoublé, une première fois, la troisième, elle ne passera pas en seconde. Elle sera orientée vers un CAP. Un premier indice de la superficialité et de l'insignifiance du film: on aimerait savoir si Marieme est vraiment très mauvaise ou si elle est victime du syndrome celle-là-vu-son-milieu-faut-l'envoyer-en-CAP; si elle s'intéresse, ou pas, au travail scolaire. Si sa réaction est due à une déception ou juste une vexation. De même qu'on aimerait savoir comment sa mère se comporte avec ses enfants; comment elle supporte les allures de cheffaillon du fils ainé. Tout cela nous aiderait à comprendre la jeune fille; cela donnerait de la chair au personnage et à son histoire. Mais non. Sur le plan sociologique on reste au niveau du croquis grossier.
Marieme est racolée par une bande de trois filles qui cherchent une quatrième (la précédente s'est fait mettre en cloque), commandée par la belle, insolente et provocante Lady (Assa Sylla) Que font elles? Pas grand chose, un peu de racket pour se procurer de la tune, elles zonent, vont à la Défense ou aux Halles, leur plus grande joie est de s'offrir une chambre d'hôtel pour passer la nuit à danser, fumer la chicha, rien de bien méchant.... Dans ce quartier, filles, garçons vivent séparés. Pas de mélange de couleurs non plus: les black entre eux, les beurs entre eux, les blancs entre eux. Bref, ces cités que certains voudraient présenter comme une joyeuse mixture, c'est total ségrégation...
On s'ennuie vite dans ce film sans consistance, sans contenu et sans caractères. Il peut plaire à la droite comme à la gauche: chacun y trouvera son miel [Y a rien à espérer de ces lascars. Quelle magnifique énergie dans les banlieues!] ! Preuve de son insignifiance.... Même si Marieme a un exquis visage d'ange et des yeux de gazelle, on ne ressent aucune empathie pour elle. Ni pour personne d'autre. Ce ne sont pas de vrais personnages, juste des héros de BD.